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AGNI

Divinité de la religion védique qui personnifie le feu (en sanskrit, agni : feu). Plusieurs « éléments » naturels (l'eau, la terre, l'air, etc.) tiennent une place importante dans la mythologie et le culte védiques, conjointement avec des « objets » cosmiques (le Soleil, la Lune, les rivières) et des « puissances » quasi abstraites (le temps, l'amour, la pensée, l'empire). Au tout premier rang de ces catégories sacrales se situe le feu, que les textes védiques révèrent sans le désigner autrement : agni (comme le latin ignis) n'est pas un nom propre, mais un appellatif utilisé pour parler aussi bien du foyer de cuisine ou de l'incendie de forêt que de la flamme brillant sur l'autel du sacrifice. À ce titre, les caractéristiques propres à l'élément igné sont toujours présentes dans la mythologie du dieu Agni : il est celui qui réchauffe, qui éclaire, qui purifie, qui détruit (en réduisant en cendres), qui règne sur la nourriture humaine (il préside à la catégorie du cuit, tenue pour supérieure à celle du cru). Les Indiens védiques, cependant, dépassent largement la simple vénération de l'élément feu : d'une part, ils font d'Agni un dieu véritable, doué d'une personnalité bien marquée et s'intégrant parfaitement au panthéon ; d'autre part, faisant la synthèse des fonctions élémentaires du feu, ils voient en lui une des deux forces qui assurent la vie du cosmos. On dit, en effet, dans les textes spéculatifs du Véda (certains hymnes, les brāhmana, les upaniṣad), que l'existence des êtres et des choses est assurée par la combinaison du pouvoir irradiant (chaud, sec, solaire) d'Agni et de la puissance féconde (froide, humide, lunaire) du soma (l'ambroisie, le nectar, le breuvage d'immortalité). Cet or et cet argent cosmiques, en se mariant au sein des eaux principielles, assurent la venue à l'être de l'univers dont la fin se produira lorsque cette union se défera. Cette place éminente du feu dans la cosmogonie justifie le rôle qu'il joue dans la liturgie. La base du culte étant l'offrande de nourriture faite aux dieux, l'oblation ne pouvait être reçue par ces derniers que dans la mesure où elle avait été consumée. Ainsi versait-on dans la flamme tout ce que l'on sacrifiait. Les rares offrandes non versées dans le feu (jetées en l'air, répandues sur le sol) étaient considérées comme saisies par des formes invisibles d'Agni (feu atmosphérique, feu souterrain). Mythologiquement, Agni est donc l'intermédiaire entre les hommes et ses pairs du monde céleste. Au début du sacrifice, le prêtre principal appelle le dieu, qui, lorsque l'offrande est déposée en lui, la saisit « entre ses bras » et la porte à son destinataire (le prêtre jette chaque offrande en indiquant à quel dieu elle est dédiée). La fumée montant vers le ciel semble un signe concret de cette mission. De ce point de vue, Agni est le premier des dieux, puisque toute cérémonie implique qu'il soit le premier invité, le premier aussi à recevoir sa part du sacrifice. D'autre part, les théologiens ont tendance à voir en lui une sorte de médiateur : il est l'ami des hommes et intercède donc en leur faveur. Les racines de la religion de la bhakti (dévotion ardente) sont à rechercher dans le culte védique d'Agni. Bien des traits, d'ailleurs, semblent préfigurer Krishna, notamment le fait que le Véda montre Agni comme un jeune homme se plaisant en la compagnie des nymphes (ou des rivières personnifiées), tel Krishna (le Govinda) jouant avec les bouvières (gopī). Enfin, Agni est psychopompe : lorsque le mortel est brûlé sur le bûcher funéraire, la cérémonie prend la forme d'un sacrifice (on dit que c'est le dernier sacrifice et que l'homme s'offre lui-même en offrande aux dieux), et le dieu premier[...]

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Lyon-III

Classification

Autres références

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