AGRICULTURE Accès aux ressources productives
L'accès à l'eau
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, l'activité agricole a connu plusieurs mutations importantes et a dû s'adapter à une demande croissante de la part de l'industrie agro-alimentaire plus exigeante, tant qualitativement que quantitativement. La pression démographique ainsi que le développement et la diffusion de techniques d'agriculture intensive ont eu un impact important sur la disponibilité et sur la qualité des ressources en eau douce, susceptible de générer des conflits d'usage. Sans développer ici la question de la qualité de l'eau, qui est traitée dans l'ensemble eau, cet article se concentre sur la dimension quantitative, et en particulier sur l'activité d'irrigation, pour souligner les enjeux actuels d'une gestion durable des ressources en eau. Après avoir rappelé les grandes évolutions de l'irrigation dans le monde, il analyse les modalités de gouvernance à l'œuvre à l'échelle locale, en s'appuyant sur plusieurs exemples qui traduisent la variété des arrangements institutionnels existants à travers le monde.
Le développement de l'irrigation depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale
Parmi les usages de l'eau, l'irrigation représente sans conteste l'activité la plus importante, car elle contribue, à l'échelle mondiale, à près de 70 p. 100 des prélèvements d'eau douce et à plus de 90 p. 100 de l'eau consommée, dans la mesure où une grande part de l'eau prélevée pour cet usage est évapotranspirée.
Au cours de la seconde moitié du xxe siècle, le doublement de la population mondiale, la modification des habitudes alimentaires, mais aussi le développement de cultures non alimentaires (fibres, oléagineux, etc.) ont poussé l'augmentation des superficies (cf. tableau) et à l'adoption de techniques d'irrigation permettant de prélever des quantités d'eau toujours plus importantes pour répondre à la demande. Les révolutions vertes se sont ainsi accompagnées de sources d'énergie autorisant un usage plus intensif de l'eau et, dans les pays en développement, les motopompes ont progressivement remplacé les modes traditionnels d'extraction reposant sur l'énergie musculaire, animale et humaine. Le remembrement des parcelles et l'arrachage des haies, malgré leurs effets néfastes sur les sols (érosion) et sur la biodiversité, ont accompagné la logique d'une agriculture intensive qui s'est traduite, au plan des techniques d'irrigation, par l'usage de pivots, d'enrouleurs, ou encore de rampes frontales capables d'irriguer de larges parcelles de plusieurs dizaines d'hectares en un seul passage. Si les eaux de surface ont été fortement sollicitées au cours de cette mutation, notamment par la construction de barrages, les eaux souterraines ont fait l'objet de prélèvements de plus en plus intensifs, générant parfois des situations de surexploitation, aux impacts environnementaux et humains importants. Bien que des techniques soient actuellement disponibles pour limiter les gaspillages d'eau et apporter les quantités nécessaires au bon développement des cultures (irrigation de précision), celles-ci demeurent coûteuses et ne concernent qu'une part très faible des superficies irriguées.
Les modes de gouvernance de l'irrigation : des objets hybrides
S'interroger sur l'accès à l'eau pour l'agriculture nécessite d'adopter un cadre d'analyse qui permette de décrire les modalités de gouvernance, à l'échelle nationale et locale, et qui tienne compte des droits de propriété qui s'exercent sur les ressources en eau. Évidemment, l'extrême variété des régimes de propriété en vigueur à travers le monde, reposant selon les cas sur les catégories issues du Code civil, ou de la [...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Michel MERLET : ingénieur agronome, directeur de l'Association pour l'amélioration de la gouvernance de la terre, de l'eau et des ressources naturelles (A.G.T.E.R.)
- Olivier PETIT : maître de conférences en économie, centre E.R.E.I.A. (E.A. 4026, université d'Artois), membre du G.D.R. réseau-ville (G.D.R. 2524 du C.N.R.S.)
Classification
Médias
Autres références
-
AGRICULTURE BIOLOGIQUE
- Écrit par Céline CRESSON , Claire LAMINE et Servane PENVERN
- 7 882 mots
- 6 médias
L’agriculture biologique (AB) est un mode de production et de transformation ayant pour objectif de préserver l’environnement, la biodiversité, le bien-être animal et le développement rural. Elle est définie dans ses principes par la Fédération internationale des mouvements d’agriculture biologique...
-
AGRICULTURE DURABLE
- Écrit par Jean-Paul CHARVET
- 5 444 mots
- 10 médias
Dans le langage courant, l’expression « agriculture durable » fait d’abord référence à une agriculture respectueuse de l’environnement, avec, comme principaux objectifs, la limitation du recours aux intrants (engrais, produits phytosanitaires…) d’origine industrielle. S’y ajoute la diversification...
-
AGRICULTURE URBAINE
- Écrit par Jean-Paul CHARVET et Xavier LAUREAU
- 6 273 mots
- 8 médias
L’expression « agriculture urbaine », qui était devenue un oxymore dans les pays industrialisés avec la disparition progressive au cours du xxe siècle des ceintures maraîchères entourant les villes, a retrouvé du sens. En effet, dans un contexte d’étalement urbain (urbansprawl) et...
-
FRANCE - (Le territoire et les hommes) - Espace et société
- Écrit par Magali REGHEZZA
- 14 014 mots
- 4 médias
L’insertion dans la mondialisation a des conséquences sur l’ensemble des systèmes productifs. Dans le cas de l’agriculture, elles viennent s’ajouter à des évolutions plus anciennes : la révolution productiviste et l’intégration européenne. -
ADVENTICES
- Écrit par Marcel BOURNÉRIAS
- 804 mots
Étymologiquement, une plante qui s'ajoute à un peuplement végétal auquel elle est initialement étrangère est une plante adventice (lat. adventicium, supplémentaire). On distingue les adventices réellement étrangères (exotiques), spontanées dans des régions éloignées (érigéron du Canada),...
-
AFGHANISTAN
- Écrit par Daniel BALLAND , Gilles DORRONSORO , Encyclopædia Universalis , Mir Mohammad Sediq FARHANG , Pierre GENTELLE , Sayed Qassem RESHTIA , Olivier ROY et Francine TISSOT
- 37 316 mots
- 19 médias
L'économie de l'Afghanistan est encore fondamentalement agricole : c'est le seul pays de la région où l'agriculture emploie plus de la moitié de la population active et contribue pour plus de 50 % à la formation du PNB. Rien pourtant de figé dans cette situation : l'agriculture afghane est brusquement... -
AFRIQUE (Histoire) - Préhistoire
- Écrit par Augustin HOLL
- 6 326 mots
- 3 médias
- Afficher les 205 références