- 1. Les moteurs du retour des agricultures urbaines
- 2. Émergence de nouvelles formes d’agricultures urbaines
- 3. Principaux fondements de la diversité des agricultures urbaines
- 4. Les agricultures urbaines et l’autonomie alimentaire de la ville
- 5. Les défis des agricultures urbaines
- 6. Exemples de reconnexions de métropoles à leurs campagnes proches
- 7. Quel avenir pour les agricultures urbaines ?
- 8. Bibliographie
AGRICULTURE URBAINE
Émergence de nouvelles formes d’agricultures urbaines
Les agricultures urbaines ne sont pas nouvelles : ces activités de production sont aussi anciennes que les villes elles-mêmes. En l’absence de transports rapides et efficaces, les produits agricoles frais étaient ainsi cultivés aux abords des villes. Pour illustrer cette relation ancienne entre ville et agriculture, on peut s’appuyer sur un exemple : celui de l’histoire des cultures maraîchères parisiennes.
Les premiers développements bien documentés du maraîchage autour de Paris remontent au xiie siècle, c’est-à-dire à l’époque des constructions de la cathédrale Notre-Dame de Paris et de la basilique de Saint-Denis. Les « jardins maraîchers » trouvent l’origine de leur dénomination dans la mise en culture d’une ancienne zone marécageuse située au nord et à l'est de Notre-Dame à l’époque où existait encore un bras de la Seine asséché par la suite. Le quartier parisien du Marais occupe aujourd’hui pour partie cet espace.
Dès le Moyen Âge, maraîchage et circuits courts se trouvent étroitement associés : les maraîchers transportent eux-mêmes leurs productions de légumes vers Paris et, au retour, ils emportent gadoues et fumiers urbains qui leur permettent de fertiliser les sols. Ces activités vont se développer au cours des principales phases de la croissance urbaine.
Alors qu’elles étaient encore localement bien présentes à Paris au début du xixe siècle, les cultures maraîchères se trouvent ensuite inexorablement repoussées hors de la ville (exurbanisation) : la croissance urbaine, qui s’intensifie à partir du second Empire (1852-1870), les éloigne de plus en plus. Elles n’en conservent pas moins leurs relations étroites avec l’organisme urbain. La ville produit à cette époque des quantités considérables de fumier de cheval, fumier qui convient particulièrement bien aux cultures maraîchères. Ces animaux, qui fournissent à l’époque l’essentiel de la force motrice nécessaire aux transports, et par ailleurs très nombreux dans les casernes, sont alors plus de cent mille à Paris et dans ses environs immédiats. Progressivement refoulés par la croissance urbaine, les maraîchers migrent non seulement avec leurs matériels de culture, mais aussi souvent avec leurs sols, transportés sur des chariots. Cette terre, enrichie par des années, voire des décennies, d’apports fertilisants, représente un capital de première importance pour le démarrage de nouveaux jardins maraîchers.
L’intensification des cultures maraîchères parisiennes avait commencé à prendre de l’importance à partir de la fin du xviiie siècle. Elle était fondée sur l’adoption de toute une série d’innovations telles que les cultures sous cloche de verre ou sous châssis vitrés. Ce passage à des formes d’agricultures plus intensives se trouve également illustré par la place faite aux cultures légumières sur « couches chaudes », technique qui a ultérieurement largement inspiré la permaculture – mode de production agricole prenant en compte le fonctionnement des écosystèmes naturels. Ces couches chaudes correspondent à des buttes ou andains d’une cinquantaine de centimètres de hauteur et constitués de composts végétaux et de fumier de cheval. La décomposition de ces masses organiques permet de réchauffer le sol et d’accélérer la levée des semis, ce qui favorise la production de primeurs commercialisés à des prix rémunérateurs sur le marché parisien.
La vie rurale est à son apogée dans la banlieue parisienne à la fin du xixe siècle. À partir de la Première Guerre mondiale, les surfaces occupées par les cultures maraîchères franciliennes régressent, comme autour de bien d’autres grandes villes, du fait de la progression de l’étalement urbain et de la concurrence de régions plus méridionales. Ces dernières, mieux placées sur le plan climatique pour la[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jean-Paul CHARVET : professeur émérite à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense, membre de l'Académie d'agriculture de France
- Xavier LAUREAU : membre de l'Académie d'agriculture de France
Classification
Médias
Autres références
-
ESPACE RURAL
- Écrit par Jean-Paul CHARVET
- 7 337 mots
- 8 médias
...bien qu’on a longtemps pu assimiler espace rural et espace agricole. Malgré la renaissance, dès les années 1990 et surtout depuis les années 2000, d’agricultures « urbaines » dans les pays riches et l’existence de productions alimentaires relativement importantes dans bien des villes de pays en développement,... -
PÉRIURBANISATION
- Écrit par Estelle DUCOM
- 4 461 mots
- 2 médias
...France, la moitié environ des terres périurbaines sont consacrées à l'agriculture et à la forêt. Le rôle de l'agriculture périurbaine a, de longue date, consisté à satisfaire les besoins alimentaires de la ville voisine. Or l'évolution socio-économique récente a profondément transformé ces rapports traditionnels....