AGUADA FÉNIX, site archéologique
Les apports du lidar en zone maya
Avant de revenir sur le projet Aguada Fénix, il importe d’évaluer l’intérêt, les apports et les limites de l’usage du lidar en zone maya. Depuis une dizaine d’années, et en fonction des moyens et des objectifs, les relevés par lidar se sont multipliés d’un bout à l’autre du territoire maya, sans oublier d’autres régions de l’aire mésoaméricaine. En dresser une liste serait inutile, mais il vaut la peine d’insister sur quelques projets pour bien marquer les différences. L’étude du sacbé (la chaussée blanche), qui unit les sites de Cobá, dans l’État du Quintana Roo, et de Yaxuna, dans le Yucatán, a par exemple fait l’objet d’une prospection linéaire, avec peu d’apports secondaires, puisque les sites qui le bordent étaient déjà connus. L’objectif était de suivre le tracé de cette route. De même, l’application du lidar dans la région de la Mosquitia au Honduras a produit des résultats presque immédiatement exploitables. Dans ce cas, l’usage du lidar n’avait pour objectif que d’amplifier et de valider la couverture archéologique. En effet, ce territoire a fait l’objet d’un peuplement limité, tardif et relativement homogène, bien étudié sur le terrain.
La plupart des études portent plutôt sur des approches régionales, autour d’un site. C’est le cas exemplaire du site de Caracol, aujourd’hui au Belize, une vaste cité ennemie de Tikal, étudiée par Arlen et Diane Chase (Chase et al., 2011). L’utilisation du lidar a permis d’identifier un paysage totalement anthropisé, avec des milliers de terrasses, un réseau dense de chaussées reliant la cité à des sites secondaires, et d’autres aménagements agricoles et résidentiels. Il est cependant difficile d’en déduire un peuplement important, sans fouilles, compte tenu de la durée de l’occupation du site.
Dans une perspective plus régionale, l’équipe de Richard Hansen poursuit, depuis 1988, une étude systématique du bassin de Mirador, au Guatemala, centrée sur le site majeur éponyme, le plus grand site connu du préclassique terminal. Les travaux ont permis de fouiller plusieurs ensembles majeurs, dont l’édifice Danta, la plus grande pyramide connue en zone maya. Des reconnaissances intensives ont permis d’identifier plusieurs sites secondaires comme El Tintal, souvent reliés à la capitale régionale par de longues chaussées empierrées. Malgré ces recherches, on manquait encore d’une vision globale. L’étude lidar du bassin karstique de Mirador/Calakmul, à la frontière nord du Guatemala, a permis d’identifier sept cent soixante-quinze établissements contre cinquante-six connus auparavant, ainsi que, de façon plus aléatoire, cent quatre-vingt-neuf autres, sur les marges du bassin, pour une superficie de 1 703 kilomètres carrés. Là encore, seule la fouille devrait fournir une évaluation fiable de la datation de ces sites.
Le projet le plus intéressant et le plus productif est coordonné en 2016 au Guatemala, dans la réserve de biosphère maya, par la fondation Pacunam Lidar Initiative. Il couvre une superficie totale de 2 144 kilomètres carrés discontinus, regroupés autour de dix projets qui effectuent des fouilles sur les sites d’Holmul, Naachtun, La Corona, El Perù, El Tintal, Uaxactun, El Zotz, pour ne citer que les principaux. Les superficies couvertes sont variées, allant de 147 kilomètres carrés pour Tikal à 432 kilomètres carrés pour La Corona. Le projet du Pacunam recoupe en partie celui de Mirador, autour du site d’El Tintal, par exemple.
Les résultats sont à la hauteur des attentes, puisque plus de soixante et un mille structures d’origine anthropique ont été identifiées et enregistrées. Elles regroupent des édifices, des villages, des routes (106 kilomètres de chaussées), des terrasses, des canaux, des champs, mais aussi des fortifications, des points d’eau aménagés ou des réservoirs.[...]
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Écrit par
- Éric TALADOIRE : professeur émérite des Universités
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Médias