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CHOUKEIRI AHMAD (1908-1980)

Fils d'un notable de Saint-Jean-d'Acre (Akka), Ahmad Choukeiri fait ses études secondaires à Jérusalem, puis commence son droit à Beyrouth, d'où il est expulsé à l'âge de dix-neuf ans par la puissance mandataire française. Il mêle à son travail auprès d'avocats en Palestine sous mandat britannique des tâches de journaliste palestinien et un militantisme politique à l'unisson d'un grand mouvement d'organisation des partis palestiniens face à la croissance du « foyer national » juif et son évolution vers une future Palestine-État juif.

À partir de 1949, ayant dû quitter son pays à la suite de la première guerre israélo-arabe, il est adjoint au secrétaire général de la Ligue des États arabes, l'Égyptien Azzām, et en même temps président de la délégation syrienne aux Nations unies. Dans cette même délégation, il participe activement à la conférence de Bandung en 1955. En 1957, il devient représentant à l'O.N.U. de l'Arabie Saoudite : destin typique de l'intellectuel palestinien qui se met au service, selon la conjoncture, de tel ou tel État arabe. En jouant en 1962 à propos du Yémen, la carte nassérienne, il s'aliène l'Arabie Saoudite, qui le démet de sa charge. Il rompt du même coup avec le leader historique de la révolte palestinienne contre le mandat britannique, Amin al-Husseini, qui vient de voir refuser par Nasser l'entrée de la Palestine dans la République arabe unie de 1958. En 1963, devant une Commission politique spéciale de l'Assemblée générale de l'O.N.U., Ahmad Choukeiri fait un discours vibrant en faveur des thèses palestiniennes. La mort de l'observateur palestinien à la Ligue arabe en 1963 lui permet, au grand mécontentement de l'Arabie Saoudite, d'occuper ce poste. Or, la question, lancée depuis 1959 par le président irakien Kassem, de l'« entité palestinienne » à restaurer sous la forme d'un État souverain en Cisjordanie et à Gaza (aux dépens de la Jordanie et de l'Égypte) fournit à Choukeiri le moyen d'étoffer considérablement cette fonction. À la faveur des sommets arabes de 1964 et de 1965, se comportant en chef d'État, il remplace l'idée irakienne (et syrienne) par celle, soutenue par Nasser, d'un statu quo amélioré : instauration d'une Organisation de libération de la Palestine (O.L.P.), non pas concurrente de la Jordanie ni de l'Égypte, mais collaborant avec elles de manière autonome. Le premier Congrès national palestinien a lieu à Jérusalem en mai 1964, en présence des délégations de la plupart des États arabes. Choukeiri s'est lui-même occupé de lever, depuis février, à travers le monde arabe, les membres (palestiniens) de cette assemblée.

On lui reprochera de n'avoir pas procédé à des élections, de s'attribuer tout pouvoir, d'être dans la main de Nasser. Ces reproches viennent des Saoudiens, des Syriens, des Irakiens, de Amin al-Husseini, et, de plus en plus, de deux organisations palestiniennes absentes du Congrès de 1964, le Fath de Yasser Arafat (mouvement de guérilla né à Gaza puis au Koweït en 1958-1960) et les « nationalistes arabes » palestiniens de Georges Habache (futur Front populaire de libération de la Palestine, F.P.L.P.). L'O.L.P. de Choukeiri va même jusqu'à recruter une Armée de libération de la Palestine (A.L.P.), intégrée en principe aux commandements arabes locaux, ce qui, en 1966-1967, provoque des incidents entre Choukeiri et le roi Hussein de Jordanie, d'autant que le Fath et le F.P.L.P. commencent les premières opérations de fedayin, en dehors même du contrôle de l'A.L.P. La guerre de juin 1967, catastrophe arabe et surtout égyptienne, permet aux fedayin, largement soutenus par la Syrie, d'exclure Choukeiri de la direction de l'O.L.P. Il est même abandonné par Nasser. Choukeiri[...]

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Écrit par

  • : docteur ès lettres et sciences sociales, directeur de recherche à la Fondation nationale des sciences politiques

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