JIBRIL AHMED (1938-2021)
Ahmed Jibril fut leleader du Front populaire de libération de la Palestine-Commandement général (FPLP-CG), un groupe palestinien né à la fin des années 1960, proche du régime syrien baathiste.
Né en 1938 à Jaffa (en Palestine alors sous mandat britannique), d’un père palestinien et d’une mère syrienne, Ahmed Jibril grandit à Damas, où il entre dans l’armée syrienne et devient officier. À l’âge de vingt ans, en 1959, il fonde le Front de libération palestinien, qu’il rapproche du Mouvement des nationalistes arabes, une mouvance dirigée par Georges Habache après la défaite des armées arabes face à Israël en juin 1967. Il en émerge le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), porté par des idées marxistes et panarabes et situé à gauche dans l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). En 1968, Ahmed Jibril fait scission et crée le Front populaire de libération de la Palestine-Commandement général (FPLP-CG), doté d’un agenda éminemment militaire. Ses troupes sont principalement constituées de Palestiniens, mais aussi de militants tunisiens, syriens, libyens... Non implanté en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, le mouvement s’appuie sur des places fortes qui se situent en Syrie (en particulier, dans le camp palestinien d’al-Yarmouk à Damas) et au Liban. Le mouvement se distingue par le soutien (financier et politique) que la Syrie lui apporte, ainsi que par une rhétorique anti-impérialiste, qu’accompagne une obsession de la lutte armée. Dans les années 1970, Ahmed Jibril et son groupe se livrent à des opérations de guérilla dont certaines – spectaculaires, par les techniques de combat employées et (ou) le nombre de victimes qu’elles entraînent – marquent les opinions publiques internationales. Il en est ainsi de l’attentat réalisé contre un avion de la compagnie Swissair en février 1970, dans lequel quarante-sept passagers – dont quinze Israéliens – périssent. De même, en 1982, le FPLP-CG se distingue en prenant en otage huit soldats israéliens au Mont-Liban, dont trois d’entre eux sont échangés, trois ans plus tard, contre la libération de 1 150 prisonniers (politiques) palestiniens. Cet échange, connu sous le nom d’« accord Jibril », a constitué le plus grand échange de prisonniers réalisé durant la guerre du Liban (1975-1990) et assis la légitimité du FPLP-CG – y compris auprès des partisans de Yasser Arafat, dont plusieurs font alors défection.
Les relations entre le Fatah (composante majoritaire de l’OLP) de Yasser Arafat et le FPLP-CG ont toujours été tendues. Tandis que le leader de l’OLP défend l’autonomie du mouvement national palestinien sur les scènes régionale et internationale, Ahmed Jibril et son mouvement considèrent, au contraire, que le devenir de la « cause palestinienne » ne devra son salut qu’à des parrains régionaux – notamment, la Syrie, mais aussi l’Iran ainsi que le Hezbollah. Dans les années 1980, le mouvement d’Ahmed Jibril prend les armes contre les partisans de Yasser Arafat au Liban, en soutien à la stratégie d'Hafez al-Assad qui voit dans la présence de l’OLP au pays du Cèdre un obstacle à ses désirs d’hégémonie régionale. Alors que l’OLP est affaiblie par le départ précipité et contraint de son appareil politique et de ses hommes du Liban après 1982, le FPLP-CG participe à des opérations militaires contre les dernières places fortes palestiniennes présentes sur place – notamment les camps de Tripoli (entre 1983 et 1985) et de Beyrouth (de 1985 à 1988). Puis, dans les années 1990, l’opposition entre le Fatah et le FPLP-CG se cristallise sur la signature, par l’OLP, des accords de paix avec Israël. Constituant alors un « front du refus », le FPLP-CG est accusé par les chefs de l’OLP et les dirigeants de l’Autorité palestinienne de « vendre » la cause palestinienne au régime syrien. [...]
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Écrit par
- Aude SIGNOLES : maître de conférences habilitée à diriger des recherches, Sciences Po Aix
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