AKKAD
L'empire akkadien et sa civilisation
Les réalisations politiques et culturelles de la cour d'Akkad ont un caractère grandiose qui ne se comprend bien qu'après une comparaison avec l'activité des princes présargoniques.
L'organisation politique
Depuis des siècles, la Mésopotamie était divisée en une foule d'États-cités, ayant chacun leur prince ou « vicaire » du dieu local. Ces chefs ne cessaient de se faire une guerre mesquine de contestations frontalières ; de temps en temps, l'un d'eux ayant vassalisé quelques villes voisines se proclamait roi. Plusieurs peuples (Sémites, Sumériens, Hourrites, Élamites) se mêlaient dans la grande vallée et souvent dans chaque cité, mais la civilisation commune portait la marque des Sumériens qui avaient inventé l'écriture cunéiforme et dont la langue était la seule écrite dans le bas pays. Le Sumérien Lougal-zaggisi, devenu maître de la Mésopotamie (2325 env.), n'avait guère touché à l'autonomie locale ni aux dynasties de vicaires.
Au contraire, la royauté akkadienne va survivre à son fondateur et, après la chute de l'empire, elle servira de modèle aux maîtres successifs de la Mésopotamie jusqu'à Nabuchodonosor (vie s. av. J.-C.). C'est que, sans doute, elle correspond à une situation nouvelle et à des méthodes inédites, seules capables d'expliquer les sursauts désespérés des villes de basse Mésopotamie, liguées contre Akkad. L'installation de Sargon dans sa capitale doit être en rapport avec une arrivée massive de Sémites fraîchement sortis du désert. Cette immigration retire la majorité numérique au groupe sumérien et peut, à elle seule, justifier le remplacement, comme langue officielle, du sumérien par l'akkadien. Ce serait un anachronisme que de parler d'antagonisme racial, mais on peut penser que les guerriers et les scribes de Sumer, qui constituaient une classe dirigeante, n'ont pas accepté l'arrivée au pouvoir des Akkadiens qui leur paraissaient des étrangers, des barbares, sinon des soudards.
Nous n'avons pas de preuves formelles que Sargon et ses successeurs aient été vraiment plus durs que les rois présargoniques, que leur bureaucratie ait été plus efficace. Mais il y a sûrement un arrière-plan politique aux représentations et aux titres étonnants qui apparaissent avec la royauté akkadienne : « Roi des quatre régions » (des quatre points cardinaux), « Dieu », « Dieu d'Akkad », le souverain figuré avec la tiare à cornes (emblème de puissance jusqu'alors réservé aux divinités). En outre, des textes obscurs évoquent les « fils du palais », troupe d'élite et garde royale que le monarque aurait dotée de terres réquisitionnées autour de sa capitale.
L'organisation économique
C'est peut-être à une opération de ce genre que correspond le décret gravé sur l'obélisque de Manishtoushou, où il est question d'un important transfert de propriétés aux environs de Kish et de Marad (région de Babylone). Ce texte obscur a servi de base à toutes sortes de théories, dont la plus courante et la moins sûre veut que l'on passe brusquement, avec Sargon d'Akkad, d'une économie dirigée par le Temple, propriétaire des terres et employeur universel, à un régime de propriété privée. En fait, le contraste apparent entre les deux époques ne tient qu'aux lacunes de notre documentation : avant Sargon, nous n'avons que les archives (en tablettes) des temples ; dans le royaume akkadien, nous ne connaissons que les documents de firmes commerciales privées et ceux de grandes propriétés attribuées par le roi à ses principaux serviteurs.
Ces textes et les œuvres d'art découvertes semblent témoigner d'une grande prospérité. La richesse de la Mésopotamie repose toujours sur l'agriculture irriguée (au moins dans le Sud, qui produit orge,[...]
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Écrit par
- Gilbert LAFFORGUE : maître assistant à l'université de Paris-Sorbonne
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Médias
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