MUTAWAKKIL AL- (822-861) calife ‘abbāside (847-861)
Calife ‘abbāside qui joue un rôle capital dans l'évolution politique et religieuse de l'Islam. Cultivé et raffiné, il aime à s'entourer de savants, de poètes, à présider un salon où rivalisent musiciens et chanteuses. Quand al-Mutawakkil succède à son frère al-Wāṯiq en 847, le mu‘tazilisme est depuis vingt ans la doctrine officielle du califat, ce qui n'a pas apaisé les querelles doctrinales ni emporté l'adhésion du petit peuple, en raison de l'intransigeance des mu‘tazilites. Dès le début de son règne, al-Mutawakkil entreprend de mettre fin à l'hégémonie doctrinale exercée par les mu‘tazilites et de restaurer le sunnisme ; en 848, il destitue tous les hauts fonctionnaires nommés par son frère et les remplace par des hommes sûrs. En 851, il destitue le principal instigateur de la politique pro-mu‘tazilite des califes précédents : le qāḍī Aḥmad b. Abī Du'ād et fait emprisonner son fils et successeur. Ne se limitant pas à ce coup d'arrêt porté au mu‘tazilisme, il s'en prend aux chrétiens et aux juifs, aggravant les mesures discriminatoires prises à leur encontre par le calife ‘Umar ; il s'attaque également aux shī‘ites : « Poussé soit par sa haine contre les ‘Ālides soit par son entourage qui préconisait une politique anti-shī‘ite, al-Mutawakkil prend une série de mesures vexatoires qui met fin à la trêve consolidée par les deux règnes précédents, et consacre la rupture entre la cour et les ‘Ālides » (Boustany). Il fait détruire toutes les tombes ‘ālides ainsi que la mosquée de Karbalā'. Pour mener à bien sa politique d'unification du califat autour du sunnisme, il s'appuie sur le petit peuple dont le sunnisme farouche et démonstratif trouve sa meilleure expression chez le juriste Ibn Ḥanbal. Enfin, il doit faire face à de nombreuses révoltes et à la guerre contre Byzance. Pour se mettre à l'abri de tout soulèvement militaire ou populaire, il se fait construire, non loin de Sāmarrā, une ville : al-Dja‘fariyya. C'est là qu'il sera assassiné, à l'instigation de son fils al-Muntaṣir, par des officiers de sa garde turque. Son effort pour restaurer l'unité du califat et le libérer de la pression des mercenaires turcs a abouti à un échec. Les troubles qui suivent son assassinat ne font qu'accélérer la décadence de l'autorité du calife qui ne sera bientôt plus qu'un jouet entre les mains de ses gardes turques.
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Écrit par
- Georges BOHAS : docteur ès lettres, directeur de l'Institut français d'études arabes de Damas
Classification
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