SUYŪṬĪ AL- (1445-1505)
Un des plus grands polygraphes de la littérature arabe et sans doute de tous les temps. Né au Caire d'un père juriste, Suyūṭī reçoit une éducation soignée. Il visite l'Égypte et accomplit le pèlerinage à La Mekke. Juriste et enseignant, il connaît la disgrâce en 1501. Il vit dès lors dans une retraite studieuse, jusqu'à sa mort.
Venant à la fin de l'époque mamlūke, Suyūṭī semble résumer et porter à leur plus haut point les tendances de la littérature arabe de cette époque, dont le trait essentiel reste la volonté d'encyclopédisme. Toutefois, à la différence des encyclopédistes proprement dits, comme Nuwayrī, Ibn Faḍl Allāh al-‘Umarī et Qalqashandī, qui rédigent en effet des encyclopédies se situant au carrefour des préoccupations des fonctionnaires de l'État mamlūk et, au-delà, d'un public cultivé au sens large, Suyūṭī conçoit son œuvre comme une rédaction d'autant d'ouvrages qu'il est possible sur les sujets les plus variés : l'encyclopédie se situe ici à la fin de l'œuvre, dans le regard que l'on jette sur elle, et non pas au début, au niveau du projet.
De omni re scibili, telle pourrait être, comme pour Pic de La Mirandole, la devise de Suyūṭī. Au cours d'une vie d'écrivain commencée à l'âge de dix-sept ans, soit en quarante-trois ans, Suyūṭī compose cinq cent soixante et un ouvrages, dont certains, il est vrai, sont fort courts, mais d'autres considérables. Ils couvrent l'exégèse coranique, le droit, la tradition (ḥadīth), la linguistique, l'histoire, les sciences, sans oublier la littérature à laquelle Suyūṭī s'essaya aussi.
Le mérite de cette œuvre reste sa quantité : étant donné que l'acte d'écrire est souvent ici purement et simplement celui de recopier, Suyūṭī nous a conservé bon nombre de passages d'œuvres aujourd'hui perdues. Il est vrai que ce mérite se restreint singulièrement si l'on songe que Suyūṭī ne cite pas toujours ses sources, tant s'en faut, ce qui rend difficile l'appréciation globale à porter sur l'œuvre. L'histoire retiendra d'elle, en tout état de cause, l'effort gigantesque d'une culture soucieuse de rassembler son avoir, pour affirmer orgueilleusement sa prééminence ou, qui sait ? pour se sauvegarder.
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Écrit par
- André MIQUEL : professeur au Collège de France
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