DECAUX ALAIN (1925-2016)
« Ce que vous avez élu en ma personne, vous, immortels, c’est l’éphémère » : ces mots prononcés le 13 mars 1980 par Alain Decaux, le temps les a démentis puisqu'il a siégé trente-six ans à l'Académie française, au fauteuil de Jean Guéhenno, où il avait été élu le 15 février 1979. Mais s'il voulut évoquer l'éphémère, c'est en raison de sa carrière d'historien tournée prioritairement vers le public de la radio et de la télévision, malgré de grands succès comme dramaturge et d'innombrables participations à des revues historiques, dont L'Histoire pour tous qu'il avait fondée en 1960.
Né le 23 juillet 1925 à Lille où son père fut bâtonnier, ce petit-fils d'instituteur interrompit ses études de droit parisiennes pour se tourner vers une carrière d'homme de lettres. À 22 ans, il publia son premier livre, Louis XVII retrouvé. Près d’une centaine de publications allaient suivre, dont une Histoire des Françaises (1972) et des biographies de Victor Hugo, Jacques Offenbach, Auguste Blanqui. S'y ajoutèrent notamment les quatre volumes d'Alain Decaux raconte, reprenant ses récits diffusés par la télévision entre 1969 et 1981, et des ouvrages pour la jeunesse : Alain Decaux raconte l'histoire de France aux enfants, Alain Decaux raconte la Révolution française aux enfants, Alain Decaux raconte la Bible aux enfants.
Il exerçait alors, selon les mots de Pierre Nora, un rôle d’« instituteur national » et incarnait la France. Dans la revue Le Débat, dès 1984, Nora saluait en lui « l'historien médiatique, transmetteur nécessaire parce qu'il crée un rapport affectif au passé et donne un sens à l'histoire ». Née à la radio, après la création, avec André Castelot, de La Tribune de l'histoire (1951-1997), la popularité d'Alain Decaux avait explosé pendant les dix ans où La Caméra explore le temps passionna les téléspectateurs (1956-1966). S'il retraça son parcours de citoyen soucieux de vérité dans ses mémoires Tous les personnages sont vrais (2005), il voulut dès 1992, dans Le Tapis rouge, livrer son expérience de ministre. Il fut en effet, sur proposition de Michel Rocard, entre juin 1988 et mai 1991, ministre délégué chargé de la Francophonie. Bénéficiant de la cote de popularité la plus élevée de tout le gouvernement, avec 75 p. 100 de bonnes opinions, il se voulut le pèlerin des dialogues « avec ces hommes et ces femmes qui, à travers le monde, [étaient prêts…] à se raccrocher à la francophonie comme à une planche de salut pour les uns, à une promesse d'avenir pour les autres ». Il n'oublia pas de rappeler que la communauté francophone représentait 10 p. 100 de la population mondiale, 12 p. 100 du PIB mondial et 20 p. 100 du commerce international. En 2001, il se prononça sur l'avenir du français, « langue maternelle de cent trente millions de gens, apprise par quatre-vingts millions d'individus ». Soulignant qu'une langue immobile était agonisante, il se réjouissait que plus de vingt mille mots nouveaux soient apparus en soixante-quinze ans dans le dictionnaire de l'Académie. Contre « l'anglais d'aéroport », il espérait beaucoup de la francophonie dont il déniait qu'elle fût un « gadget ». Il plaidait pour que la survie du français soit élevée « au rang de cause nationale. Parce que l’image de la France est en jeu et, au-delà, son rayonnement, son prestige, sa place dans le monde ».
Président du groupement syndical des auteurs de télévision (1964-1966 et 1971-1972), vice-président (1965-1967 et 1969-1971) puis président de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (1973-1975), Alain Decaux écrivit plusieurs pièces et les textes de grands spectacles montés par Robert Hossein, parmi lesquels Notre-Dame de Paris (1978), L'[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Charles-Louis FOULON : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)
Classification
Média
Autres références
-
CASTELOT ANDRÉ (1911-2004)
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 170 mots
Journaliste et historien. D'origine belge, André Castelot, de son vrai nom André Storms, fait ses études à Paris et s'oriente vers l'investigation historique. Il fonde en 1948 la collection Présence de l'histoire (Librairie académique Perrin). Avec Alain Decaux, il produit,...
-
HOSSEIN ROBERT (1927-2020)
- Écrit par Véronique HOTTE
- 929 mots
- 1 média
Né à Paris le 30 décembre 1927, Robert Hossein – de son vrai nom Abraham Hosseinoff –, est mort le 31 décembre 2020, après avoir mené tambour battant une longue carrière d’artiste populaire et protéiforme, au cours de laquelle il fut tour à tour comédien, réalisateur de films et metteur en scène de...