FINKIELKRAUT ALAIN (1949- )
Essayiste engagé, Alain Finkielkraut usa d'abord d'un humour corrosif pour débusquer, avec Pascal Bruckner, les pièges des « nouvelles normes » sociales issues de Mai-68, avant d'adopter ensuite un ton plus incantatoire dans sa dénonciation des mirages de la modernité. Sa réflexion se nourrit de l’étude des rapports qu'entretiennent la mémoire, la tradition ou encore la culture avec le progrès ; elle se situe « entre l'impossible oubli et l'injonction de commémorer ».
Né le 30 juin 1949 à Paris, Alain Finkielkraut a entrepris des études de philosophie à l'École normale supérieure de Saint-Cloud qu'il intègre en 1969. Il quitte rapidement l'Éducation nationale pour se consacrer à l'écriture, mais il enseignera la philosophie et l'histoire des idées à l'École polytechnique de 1989 à 2014.
Il se fait connaître en 1977 avec Le Nouveau Désordre amoureux, un livre écrit en collaboration avec Pascal Bruckner, qui porte sur le « mythe de la révolution sexuelle », véhicule d'une image attrayante de l'émancipation mais toujours empreinte de machisme. Son thème de prédilection devient la critique de la modernité avec La Défaite de la pensée (1987) qui dénonce, sur les traces d'Hannah Arendt, la banalisation de la culture, « annoncée partout et n'existant plus nulle part ». Dans ses travaux suivants, L'Humanité perdue : essai sur le XXe siècle (1996), L'Ingratitude, conversation sur notre temps (1999), Nous autres modernes (2005), Philosophie et modernité (2008), dans sa revue Le Messager européen, ou bien avec les invités de l'émission « Répliques », qu'il anime sur France-Culture, Alain Finkielkraut ne cesse d'approfondir la question de l'héritage culturel et de sa transmission, notamment à travers l’enseignement (La Querelle de l’école, 2007). Ce lecteur de Péguy auquel il a consacré un beau livre (Le Mécontemporain. Charles Péguy, Lecteur du monde moderne, 1992) fustige ses contemporains pour leur légèreté, leur absence de mémoire et de sens de la dette, leur tendance à confondre les inclinations du moment avec les engagements de la liberté. Lecteur de Hannah Arendt et de Léo Strauss, il ne cessera d’opposer au relativisme culturel qui, selon lui, signe la modernité, les valeurs de l’universalisme, seul garant d’une réelle transmission.
C'est sur ce même mode qu'il interrogera sa propre culture. Né en 1949 à Paris, fils unique d'un maroquinier juif polonais déporté à Auschwitz, il est interviewé en octobre 1980, peu après l'attentat contre la synagogue de la rue Copernic à Paris, à l'occasion de la parution de son livre Le Juif imaginaire. Se déclarant athée, il définit le judaïsme, non comme un État-nation mais comme une « méta-famille ». « Ce que je rejette, dit-il, ce sont toutes les puissances de l'oubli qui nous amèneraient à penser que le génocide, la mémoire, la tradition n'ont pas d'importance. Être Juif aujourd'hui, c'est s'efforcer de retrouver contact avec cela. » Commencée comme une méditation sur le sens de la condition juive dans la culture contemporaine, où il voit la possibilité de réunir émancipation effective et affirmation d'une singularité, cette réflexion s'infléchira par la suite en polémique lors du procès Barbie, lorsque Alain Finkielkraut, dans La Mémoire vaine (1989), s'inquiétera d'une « compétition des mémoires » entre les parties civiles juives et les résistants. « Les descendants des victimes de la Shoah n'ont aucun titre à se présenter eux-mêmes comme des victimes », expliquera-t-il encore. Il s'en prendra également au communautarisme islamiste qui menace la société quand l'idée de nation se délite. Dans la revue L'Arche de janvier-février 2002 (et donc[...]
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Écrit par
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