JUPPÉ ALAIN (1945- )
Homme politique français, Premier ministre de 1995 à 1997.
Brillante mécanique intellectuelle, pur produit de la méritocratie républicaine, Alain Juppé est né le 15 août 1945, à Mont-de-Marsan (Landes), d'une famille d'exploitants agricoles aisés. Entré à Normale sup' à dix-neuf ans en 1964, agrégé de lettres classiques trois ans plus tard, puis énarque et inspecteur des finances, il a fait ainsi partie de ces « premiers de la classe » qui peuplent en France la haute administration et font tourner, dans l'ombre, la machine de l'État.
Dans les pas de Jacques Chirac
Alain Juppé sera d'abord l'« économiste de Chirac ». Lorsqu'il est appelé au cabinet du Premier ministre, en 1976, avant de suivre celui-ci, quelques mois plus tard, dans l'appareil dirigeant du parti gaulliste, le Rassemblement pour la République (RPR), c'est en sa qualité de spécialiste des affaires économiques ; et quand, en 1980, il rejoint la haute administration de la Ville de Paris, c'est pour être nommé directeur des finances de la capitale. En 1981, dans l'état-major de la première campagne présidentielle du maire de Paris, il est chargé d'expliquer le programme économique du candidat. Alain Juppé est toujours perçu comme un homme de dossiers, au service du maire de Paris. Il renonce même à se présenter aux élections législatives de 1981, échaudé par un premier échec dans son département natal des Landes, en 1978. Finalement élu conseiller de Paris en 1983, il deviendra deuxième adjoint de Jacques Chirac, chargé des finances. Membre du Parlement européen (1984-1986), élu député de Paris en 1986 et en 1988, il devra toutefois patienter jusqu'à sa nomination, en 1988, au poste de secrétaire général du RPR pour être enfin reconnu comme un responsable politique à part entière.
Fidèle porte-parole du président du RPR, Alain Juppé est de ceux qui, dans la famille gaulliste, se sentent plus proches d'une droite libérale et moderne que du gaullisme populaire à tendances sociales dont Charles Pasqua et Philippe Séguin se veulent les représentants. Il est l'un des principaux artisans de la plate-forme présentée par l'opposition aux élections législatives de 1986. Rendu public à la fin de 1985, ce « pacte pour la France » est marqué par la vogue du reaganisme, auquel s'est rallié Jacques Chirac. Devenu ministre délégué au Budget dans le premier gouvernement de cohabitation (1986-1988), il se heurtera aussi à Édouard Balladur, son ministre de tutelle, mais ces conflits résulteront davantage de susceptibilités personnelles que de divergences doctrinales.
En 1988, deuxième campagne présidentielle de Jacques Chirac, deuxième échec. Porte-parole du candidat, Alain Juppé a pris une part active au débat électoral : secrétaire général du RPR, il doit gérer les « ondes de choc » de la défaite. Il lui faudra faire face à diverses formes de contestation, dont la plus constante sera celle de Philippe Séguin. Maintenant avec fermeté l'unité du parti, il permet que s'exprime la diversité des courants, obtient l'adoption d'une attitude intransigeante à l'égard du Front national, et une position plus ouverte sur la construction européenne. Surtout, il remet en état de marche l'appareil et constitue une équipe solide et expérimentée qui assurera, en 1993, puis en 1995, les victoires électorales de Jacques Chirac. Il y gagne même une certaine popularité auprès des militants, sans cesser toutefois d'apparaître à leurs yeux et à ceux de l'opinion comme un technocrate sûr de lui et, il le reconnaîtra lui-même, un peu trop arrogant.
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Écrit par
- Thomas FERENCZI
: ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de lettres classiques, médiateur du journal
Le Monde - Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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