PLATEL ALAIN (1956- )
Le chorégraphe belge Alain Platel appartient à cette nouvelle génération d'artistes qui refusent de choisir entre la danse et le théâtre et savent associer les matériaux les plus divers pour laisser surgir l'impact émotionnel attaché à l'humanité dans toute son intensité. Cherchant à faire en sorte que la barrière entre le public et la scène soit la plus infime possible, ses spectacles, d'une force peu commune, orchestrent une sorte de chaos, proposent une « danse bâtarde » dans laquelle convergent divers genres artistiques, et aspirent, au-delà des conventions, à une transposition physique de sentiments impossibles à contenir, à une forme de communication non verbale.
Un collectif très singulier
Né le 9 avril 1956 à Gand, Alain Platel entre à onze ans à l'école de mime de Marcel Hoste avant d'entreprendre des études d'orthopédagogie dans sa ville natale. Il passera cinq années à s'occuper d'enfants lourdement handicapés. Parallèlement, il s'inscrit à l'académie de ballet Paul Griinwis et s'oriente en autodidacte vers la création artistique. En 1984, il crée son premier spectacle, Stabat Mater, avec sa sœur Pascale et quelques amis. Cherchant à transcender la dimension individuelle, il impose dès le départ que ses danseurs aient une forte personnalité et soient aussi différents que possible, tant du point de vue de l'expérience professionnelle que de celui de l'horizon culturel ou de l'âge. Il recherche des individus qui possèdent une façon de se mouvoir singulière plus que des capacités gestuelles. Ses chorégraphies explorent de nouveaux champs, notamment ceux de la conscience sociale ou d'une danse en prise avec le réel – au point que l'on parlera à son sujet de « danse documentaire ».
En 1984, il fonde les Ballets contemporains de la Belgique qui seront surnommés ensuite Ballets C. de la B. Cette appellation est en soi une sorte de manifeste humoristique. Tout d'abord parce que cette petite compagnie n'a rien d'un « ballet », ni dans son effectif, ni dans son fonctionnement, ni dans son style. Ce nom est ensuite un « pied de nez » aux Ballets du xxe siècle de Maurice Béjart, installés alors à Bruxelles. Enfin dans le contexte de la Belgique des années 1980 en proie à des conflits communautaires, Alain Platel provoque en nommant sa compagnie flamande en « mauvais » français (on devrait dire Ballets contemporains de Belgique).
Au fil des années, cette troupe, qui fonctionne en collectif où chacun a une responsabilité dans le spectacle, devient une plate-forme artistique pour différents chorégraphes comme Sidi Larbi Cherkaoui, Hans van den Broeck, Koen Augustijnen et Christine de Smedt. Sous l'égide d'Alain Platel, ils formeront une sorte de nouvelle école flamande au style inimitable, mélangeant danse, cirque, musique baroque, voix, hip-hop..., bousculant ainsi tous les présupposés de la danse contemporaine et s'éloignant des schémas de la danse flamande en vogue.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Agnès IZRINE : écrivaine, journaliste dans le domaine de la danse
Classification