ALBANE FRANCESCO ALBANI dit L' (1578-1660)
Comme le Dominiquin et Guido Reni, le peintre bolonais Francesco Albani travaille chez Denis Calvaert, un maniériste anversois fixé très tôt en Italie, avant d'entrer, vers 1595, dans l'atelier des Carrache. Le plus célèbre de ceux-ci, Annibal, est déjà parti pour Rome à cette époque. C'est pourtant son influence, sans doute par l'intermédiaire des œuvres qu'il a laissées à Bologne, qui marque le plus, à leurs débuts, le jeune Albani et ses condisciples. Assimilant son classicisme tempéré, sensible au chromatisme vénitien comme à la pureté formelle de Raphaël, l'Albane trouvera dans les larges compositions décoratives ouvertes, aérées, d'Annibal le point de départ de sa propre conception du paysage, où il révélera l'aspect le plus personnel, le plus poétique, de son talent. Il ne tardera pas, du reste, à rejoindre Annibal à Rome (1601), après avoir travaillé avec Guido Reni et le Dominiquin à l'oratoire de San Colombano (Apparition du Christ ressuscité à la Vierge, Repentir de saint Pierre), au palais Fava (ignudi et frise mythologique) et à San Domenico (Mystères du Rosaire). Sa première œuvre romaine, l'Assomption peinte dans une lunette de la chapelle Aldobrandini au Corso, est exécutée sous la direction d'Annibal Carrache. Elle offre pourtant un caractère déjà personnel par son classicisme adouci, et surtout par le beau paysage aux rythmes sereins où persiste l'intensité tonale des Vénitiens. Il peint ensuite, sur les dessins d'Annibal, les fresques de la chapelle Herrera, à Saint-Jacques des Espagnols (aujourd'hui transférées au musée du Prado à Madrid et au musée de Barcelone). Après la mort de son maître en 1609, Francesco Albani regagne Bologne, décore la galerie du palais Giustiniani à Bassano di Sutri (1609-1610) avec des scènes de l'Histoire de Phaéton où affleure le souvenir de la galerie Farnèse, mais dans une ambiance de grâce idéalisée, élaborée à partir des compositions de Raphaël à la Farnésine. À la loggia du palais Verospi, à Rome, l'influence de Raphaël est très marquée ; il reprend l'un de ses sujets dans l'Apollon et Daphné du Louvre. De 1612 à 1614, il décore l'abside de Sainte-Marie-de-la-Paix (figures de prophètes dans les écoinçons, Assomption sur la voûte, Dieu le Père dans la lunette au-dessus de l'autel). Au cours des années suivantes, à Bologne, à Mantoue puis de nouveau à Rome, l'Albane peint pour le duc de Mantoue (Histoire de Vénus, musée du Louvre), pour Scipion Borghèse (Vénus et Adonis, Triomphe de Diane), pour Maurice de Savoie (les Quatre Éléments, pinacothèque de Turin), des scènes idylliques dans de vastes horizons clairs ou crépusculaires, qui lui valent une grande réputation et dont l'atmosphère annonce parfois Claude Lorrain. Il quitte Rome en 1625 et, de retour à Bologne, il réalise des compositions religieuses pour les églises de la ville (Baptême du Christ à San Giorgio ; tableau d'autel et fresques à la Madona di Galliera, 1630 ; Noli me tangere, dans l'église des Servi), où affleure parfois un souffle baroque. Il continue aussi à produire des scènes mythologiques, mais sans renouveler son inspiration ni sa veine poétique : on ne trouve plus, dans la production de cette période, cette oscillation entre l'idéalisation classique et la sensualité subtile qui donne leur accent original, leur délicatesse limpide, à ses œuvres antérieures.
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Écrit par
- Marie-Geneviève de LA COSTE-MESSELIÈRE : critique d'art
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