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ALBERT LE GRAND (1193?-1280)

Dominicain, maître de l'université de Paris (d'où son nom de « Maître Albert »), évêque, savant, philosophe et théologien célèbre du xiiie siècle, Albert a, de son vivant, joui du titre de « Grand » et, par la suite, de celui de « Docteur universel ». La légende lui a beaucoup prêté. Encombrée d'apocryphes, son œuvre multiforme (elle a acclimaté dans l'Occident latin les savoirs et les philosophies des Arabes et des Grecs) est aujourd'hui mieux connue et fait l'objet d'une édition critique, encore en chantier, à Cologne. Elle a subi une éclipse partielle du fait de l'œuvre, encore plus fameuse, du disciple d'Albert, Thomas d'Aquin. Étudiée pour elle-même, elle manifeste un esprit d'une vigueur et d'une ampleur exceptionnelles.

Albert, né à Lauingen (Souabe) à la fin du xie siècle (en 1193, assure une tradition probable) d'une famille de militaires (le titre nobiliaire « de Bollstädt » est légende) au service de l'Empire, séjourne plusieurs années en Italie du Nord (Venise, Padoue) pour y étudier (les lettres et probablement la médecine). En 1223, à Padoue, il entre dans le nouvel ordre des Prêcheurs et va étudier la théologie à Cologne, où, en 1228, il se met à enseigner cette discipline. Il professe ensuite à Hildesheim, à Freiberg (Saxe), à Strasbourg et, vers 1240 ou 1241, à Paris, où il découvre les ouvrages grecs et arabes nouvellement traduits. Dès 1245, promu maître de l'université de Paris, il dirige l'une des deux écoles des Prêcheurs qui sont intégrées à celle-ci. Thomas d'Aquin y est alors son disciple.

En 1248, il regagne Cologne, où son ordre le charge de fonder l'École supérieure de théologie (Studium generale). Il en assure la direction jusqu'en 1254 (il est élu supérieur de la province dominicaine de Teutonie). En 1252, arbitre dans le conflit qui oppose la ville de Cologne et son archevêque, il inaugure cette tâche de conciliateur qu'à la demande des municipalités, des notables ou du pape il fera sienne souvent et dont il s'acquittera toujours avec succès. Déchargé en 1257 de ses fonctions de provincial, il reprend l'enseignement à Cologne. En 1259, au chapitre général de l'ordre à Valenciennes, il organise, avec Thomas d'Aquin entre autres, les études des Prêcheurs en les ouvrant aux philosophies nouvelles.

En 1260, le pape Alexandre IV le charge du diocèse de Regensbourg, qui est à réorganiser. Dédaigneux du faste et poursuivant malgré tout ses études, il y semble mal accueilli. Il présente sa démission en 1262, mais Urbain IV le garde à la curie et, en 1263, le délègue en Allemagne pour relancer la croisade. Puis il reprend l'enseignement : en 1264 à Würzbourg, en 1267 à Strasbourg et en 1270 à Cologne. En 1274, il aurait participé au concile œcuménique de Lyon. Vers 1276-1277, il aurait accompli un ultime voyage à Paris en vue d'apaiser (ce fut en vain) l'hostilité des théologiens de l'université à l'endroit de ces philosophies grecques et arabes qu'il avait plus que quiconque contribué à faire connaître. Les infirmités (perte de la vue, de la mémoire) assombrissent ses dernières années. Il meurt à Cologne le 15 novembre 1280. Honoré comme bienheureux durant des siècles, il a été canonisé en 1931 et, en 1941, proclamé patron des savants chrétiens.

Animé d'une exceptionnelle curiosité scientifique et philosophique, Albert, par ses vastes et savants ouvrages (21 in-folio dans l'édition Jammy de 1651), est un géant du xiiie siècle. De son vivant, il a joui d'une immense réputation. Il a excellé en trois grands domaines du savoir : sciences naturelles, philosophie et théologie. La légende s'est attachée à son nom : on lui a prêté la pratique de la magie ; et de multiples apocryphes, qui vont des sciences occultes[...]

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  • ANALOGIE

    • Écrit par , et
    • 10 427 mots
    ...comme participation graduelle à l'Esse » (P. Aubenque). Cette platonisation transparaît dans certaines définitions de l'analogie utilisées par Albert le Grand dans son commentaire sur les Noms divins du pseudo-Denys l'Aréopagite. Attribuée à Proclus, la caractérisation du deuxième mode de l'analogie...
  • ANTHROPOMORPHISME

    • Écrit par
    • 7 544 mots
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    ...la cause première. Ainsi s'effectue la recherche de l'ineffable : lorsque l'on pense à Dieu, ce qui peut encore être désigné par un nom n'est pas Dieu. Albert le Grand écrit (Tract., III, xvi) : « Dieu est à la fois innommable et omninommable. Il est innommable et l'Innommable est le plus beau de tous...
  • AVICENNE, arabe IBN SĪNĀ (980-1037)

    • Écrit par
    • 8 902 mots
    • 1 média
    ...une nette influence, certes, mais finalement au prix d'une altération radicale. On relèvera, en premier lieu, l'intérêt des références à Avicenne chez Albert le Grand, dans ses œuvres minéralogiques. Maître Albert a lu dans la physique d'Avicenne qu'une certaine force est immanente à l'âme humaine, une...
  • AVICENNISME LATIN

    • Écrit par
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    Quand, en plein xiiie siècle, Albert le Grand écrit que l'on ne peut connaître le vrai sans grâce, car « même si on a la science habituelle de quelque chose on n'actualisera ce savoir virtuel qu'en se tournant vers la lumière de l'Intellect incréé », il est, à sa manière, dans la mouvance du ...
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