Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

SOBOUL ALBERT (1914-1982)

Le mot fidélité résume le mieux la vie et l'œuvre d'Albert Soboul, historien prestigieux de la Révolution française. Fidèle à la terre de ses ancêtres – il décrivait volontiers Nîmes et, au creux des garrigues, les villages dont certains portaient son nom, et peignait avec sensibilité cette petite patrie dont les habitants avaient eu très tôt l'amour de l'égalité –, il le fut également à la patrie indissociable, pour lui, de la Révolution et de la République. N'était-ce pas grâce à cette dernière qu'il avait pu, lui qui était d'une origine modeste, parvenir aux plus hauts échelons de la carrière universitaire ?

La formation et les débuts

Albert Soboul est né près de Mostaganem, en Algérie, en 1914. Interne au lycée de Nîmes puis à Louis-le-Grand, il fut reçu à l'agrégation d'histoire en 1938. Professeur à Montpellier puis au lycée Henri-IV, il fut attaché au C.N.R.S. de 1950 à 1953 avant de retrouver un poste de professeur au lycée Janson-de-Sailly et à nouveau à Henri-IV. Chargé d'enseignement en 1960 puis professeur en 1962 à la faculté des lettres de Clermont-Ferrand, il fut élu en 1967 à la chaire d'histoire de la Révolution, en Sorbonne.

Il y avait chez cet homme, ancien pupille de la nation, éduqué par une tante, directrice d'école normale d'institutrices, quelque chose de ces « hussards noirs » dont parle Péguy. « Mettre en doute, écrira un de ses élèves, le rôle fondateur et libérateur de la Révolution était, pour Albert Soboul, à la fois un péché contre l'esprit et une agression personnelle », d'où ces « coups de colère » qui scandaient ses cours magistraux. Ses colères qui retombaient aussi vite qu'elles s'étaient levées s'adressaient tout aussi bien à certains de ses collègues qu'aux étudiants contestataires. Pourtant, comme le dira un de ces derniers : « On pouvait batailler contre lui et en être meurtri, on ne pouvait pas ne pas lui porter affection tant l'homme était profondément chaleureux. » Lorsqu'il enseignait, Soboul savait faire revivre, sans presque jamais consulter ses notes, le drame et les acteurs de 1789 ou de l'an II. Les étudiants venus nombreux pour l'écouter oubliaient le temps qui s'écoulait. Plus d'un témoigne encore d'avoir « sauté » un déjeuner pour rester dans l'« amphi » Turgot avec le maître qui, midi étant depuis longtemps sonné et le cours terminé, continuait sa leçon. Au jeune enseignant qui venait prendre, à ses côtés, les fonctions d'assistant, il ne donnait qu'un conseil : « Des faits, des dates, du savoir, de la science, mais toujours une touche d'émotion ; sans elle, impossible de traduire la sensibilité à fleur de peau des patriotes. » Tout à la fois héritier de la République des talents et fils d'un milieu populaire, Soboul était, vers 1934, un de ces jeunes républicains « rouges », comme l'on disait dans le Midi pour désigner les radicaux les plus extrêmes. C'était le moment où le Parti communiste s'engageait peu à peu dans la voie du Front populaire, réconciliant la classe ouvrière et la IIIe République, la « Marseillaise » et l'« Internationale ». Soboul devint communiste et le resta jusqu'à sa mort.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur d'histoire moderne à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, agrégé de l'Université, docteur ès lettres

Classification

Autres références

  • RÉVOLUTION FRANÇAISE

    • Écrit par et
    • 29 554 mots
    • 3 médias
    ...pays, doit donc être comprise au travers d'inlassables dépouillements d'archives dans une optique résolument économique et sociale, sur fond de marxisme. Cette école, dont Albert Soboul prendra la tête par la suite, va diffuser durablement son enseignement, mais se trouve mêlée à de nouvelles luttes historiographiques....