ALCHIMIE
L'alchimie occidentale
Ses origines
On admet généralement que, comme en médecine, en mathématiques, en astronomie, les premiers monuments de l'alchimie occidentale ont été des traductions d'ouvrages arabes, par exemple, le Livre des Septante de Geber, ou la Turba philosophorum.
Vraisemblablement, les trois voies de pénétration de l'alchimie arabe dans l'Europe chrétienne furent l'Espagne, la Provence et la Sicile. Si beaucoup de traducteurs d'ouvrages alchimiques arabes nous sont inconnus, de sérieux indices permettent de supposer que les savants juifs, établis en Provence après avoir été chassés de Cordoue par le fanatisme des Almohades, ont joué un rôle important dans la diffusion de ces traités.
Les connaissances métallurgiques étaient cependant plus développées en Occident avant le xiie siècle, époque probable de l'apparition de l'alchimie arabe, que les historiens ne semblent le supposer. Ganzenmüller a rappelé que le célèbre traité, Schedula diversarum artium, du moine Théophile, contient la plus ancienne formule connue d'alchimie occidentale. Ce recueil technique, l'un des plus précieux du Moyen Âge, date de la fin du xie siècle. Il mentionne le traitement des métaux pour fabriquer l'or « arabe » et l'or « espagnol ». À vrai dire, ce procédé n'est point « alchimique », comme le dit Ganzenmüller, mais chimique : il s'agit d'alliages. Néanmoins cela prouve que ce genre de recherches a été connu par les artisans, bien longtemps avant les premières traductions d'ouvrages arabes.
Ses structures
L'alchimie occidentale peut être divisée en trois branches principales. La première, aristotélicienne, a développé les applications de la théorie antique des quatre éléments à la transmutation des métaux. Préchimique et relativement rationnelle, elle se rattache plutôt à la tendance expérimentale de Rhazès. La seconde, concevant le monde comme un vaste organisme animé, reprenant les théories des stoïciens sur la sympathie et l'antipathie des êtres, a recherché les relations entre la vie des métaux et l'âme universelle, assimilant ainsi les manifestations inorganiques aux phénomènes biologiques. Une seule gnose, l'« Art d'Amour », dominait cette philosophie de la nature. Son orientation la rapproche plutôt de la gnose jabirienne. C'est la voie traditionnelle la plus importante et la plus généralement suivie par les maîtres de l'alchimie occidentale.
La troisième branche, à peu près inconnue, non seulement des historiens, mais de la plupart des alchimistes eux-mêmes, n'a laissé aucune trace écrite. Transmise toujours oralement, elle n'est pas essentiellement différente de la tradition chinoise archaïque. Elle n'est ni préchimique, ni philosophique, ni mystique. On peut la nommer « magique », à condition d'admettre qu'il existe une magie « naturelle » et qu'elle ne présente pas de rapports avec la sorcellerie. La source arabe la plus proche de cette tradition secrète est l'œuvre de Ya'kub ibn Ishāk ibn Sabbāh al-Kindi, le Liber de radiis stellicis, traité dans lequel le mouvement des étoiles et « la collision de leurs rayons » (Thorndyke) produisent, selon cet auteur, une infinie variété de combinaisons. Le feu, la couleur et le son émettent aussi des radiations. Ces théories furent connues de Roger Bacon. Elles semblent avoir été ignorées d'Albert le Grand. Bacon y fut initié oralement par un adepte inconnu qu'il nomme « le maître des expériences » et que Humboldt a supposé être Pierre Pérégrin de Maricourt.
Ses techniques
Ces trois orientations distinctes de l'alchimie occidentale correspondirent à des techniques différentes. La première, ayant pour but principal la transmutation métallique, utilisa les fours d'usage courant, de fondeur[...]
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Écrit par
- René ALLEAU : historien des sciences et des techniques, ingénieur conseil
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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