FRAGONARD ALEXANDRE ÉVARISTE (1780-1850)
Le fils de Jean Honoré Fragonard, sans participer au génie de son père, a su tenir une place non négligeable dans la peinture des premières décennies du xixe siècle, illustrant en particulier ce que l'on appelle le style troubadour. « Il fut élève de son père et de David, et malheureusement, il prit beaucoup plus au second maître qu'au premier » résumait la première édition du dictionnaire biographique de Bénézit, en 1924. Notre jugement a évolué ; cette appartenance à la manière néo-classique nous apparaît aujourd'hui précisément comme une des caractéristiques de ces artistes pararomantiques dont l'apport principal a été un renouvellement de l'iconographie et de la sensibilité plus que de la technique picturale.
L'illustrateur et le peintre sont féconds. Fragonard expose régulièrement de 1799 à 1842, il est gratifié de commandes importantes : pour la Chambre des députés, pour le Louvre où il décore deux plafonds dans les salles aménagées sous la Restauration pour la céramique antique (François Ier armé chevalier par Bayard à Marignan, Salon de 1819, et Primatice présentant à François Ier les antiques rapportés d'Italie, Salon de 1827). Les sujets sont significatifs du goût de l'artiste. Les Bourgeois de Calais (1822, musée d'Arras), La Condamnation des Templiers (musée Magnin, Dijon), L'Entrée de Jeanne d'Arc à Orléans (1822, musée d'Orléans), autant de thèmes pris à l'histoire nationale et médiévale, alors que le retour à l'antique n'avait pas fini de dominer.
Si le grand dessin rehaussé du Jeune Pyrrhus à la cour de Glaucias prouve l'assimilation des leçons davidiennes, Évariste sait aussi être un coloriste fluide. Plutôt que d'y voir systématiquement l'influence ou l'imitation paternelle (on a par exemple redonné à Évariste des dessins pour le Don Quichotte longtemps attribués à son père), il faudrait souligner le modernisme de la Mort du duc de Berry (1824, musée Bonnat à Bayonne) ou de l'esquisse pour le concours de 1830 sur le thème de Boissy d'Anglas saluant la tête du député Féraud (coll. privée), toiles qui méritent le qualificatif de romantique, par le sens de l'animation et du clair-obscur, par le sacrifice du détail à l'impression d'ensemble et par un système coloré où les passages l'emportent sur les tons locaux.
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Écrit par
- Bruno FOUCART : professeur à l'université de Paris-Sorbonne
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