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ALEXANDRE LE GRAND (356-323 av. J.-C.)

La conquête de l'Iran oriental

Néanmoins, sûr de l'appui d'amis fidèles, dont Hephæstion, promu « Chiliarque » (dignité aulique perse qui faisait de lui le second personnage de l'empire), Alexandre s'engagea dans les satrapies orientales et dans une mutation lente, mais profonde, des traditions politiques et militaires de sa nation.

Malgré les investigations des explorateurs (xixe s.) et des archéologues (xxe s.), beaucoup de points restent obscurs : chronologie souvent incertaine, itinéraires conjecturaux, contradictions de nos sources qui maîtrisent mal leur information et méconnaissent des régions dominées de leur temps par les Parthes.

Une remarque préliminaire s'impose : si la culture et la religion de l'Iran oriental ne différaient pas sensiblement de celles de l'Iran occidental (à cette réserve près que les influences méditerranéennes, en particulier grecques, y étaient moins sensibles), les populations, sujettes des Perses, s'étaient souvent rebellées contre les Achéménides. Loin de les accabler, la disparition de l'empire permettait à ces Iraniens orientaux de retrouver leur liberté. Quant aux populations des marches (Scythes d'Asie centrale, principautés et ethnies, indo-européennes ou dravidiennes, du bassin de l'Indus), on peut affirmer qu'elles s'inquiétaient plutôt de l'apparition, sur leurs frontières, d'un nouvel impérialisme, autrement plus dynamique et brutal que celui des Perses. Il est d'autre part certain que l'armée d'Alexandre (Macédoniens aussi bien que Grecs) ne s'engageait qu'à contrecœur dans des régions immenses, souvent inhospitalières, où les profits de la guerre paraissaient maigres comparés aux difficultés de conflits relevant souvent de la guérilla. Mouvements d'humeur et même mutineries se succéderont jusqu'à la fin du règne.

Si Alexandre estima néanmoins nécessaire de s'engager dans ces provinces lointaines, ce fut d'abord parce que leurs satrapes, après avoir éliminé Darius, ne désarmaient pas. Il fallut réduire successivement l'Arie (province de Hérat) puis l'Arachosie (province de Kandahar) avant de remonter, au moment des premières neiges, jusqu'à Kaboul, où l'armée passa l'hiver 330-329. Mais, au-delà de l'Hindou-Kouch, que les Grecs confondaient avec le Caucase, le satrape de Bactriane, Bessos, s'était proclamé Grand Roi, affirmant ainsi, sur l'ensemble de l'empire achéménide, des prétentions qu'Alexandre ne pouvait tolérer. Trois années seront nécessaires pour l'abattre et surtout éradiquer toute résistance dans les vastes régions, en partie désertiques, comprises entre l'Hindou-Kouch et le fleuve Iaxarte (Syr-Darya).

Au printemps de 329, Alexandre franchit l'Hindou-Kouch. Affaibli par les désertions, Bessos se réfugia au-delà du fleuve Oxos (Amou-Darya), dans la riche province de Sogdiane. Croyant qu'Alexandre n'en voulait qu'à la personne de l'usurpateur, les habitants le lui livrèrent nu et enchaîné. Il fut fouetté, jugé puis sauvagement exécuté. Mais Alexandre voulait aussi l'entière soumission de la Sogdiane et prit possession de sa capitale, Maracanda (Afrasyab, près de Samarkand). Il dut cependant compter avec la résistance, longue et opiniâtre, des campagnes, conduite par Spitamène, un noble sogdien. Il en vint à bout par des moyens brutaux : destruction des villes et des bourgs, massacres, asservissement des populations vaincues, installation de colonies militaires. Restaient les tribus des contreforts himalayens, qu'Alexandre soumit moins par la guerre que par la diplomatie, prenant pour épouse Roxane, fille de l'un des principaux chefs locaux, Oxyartès (fin du printemps 327). Succès diplomatiques également que les accords conclus avec les Scythes d'au-delà[...]

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Écrit par

  • : correspondant de l'Institut (Académie des inscriptions et belles-lettres), professeur de langue et littérature grecques à l'université de Nancy-II

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Alexandre le Grand - crédits : A. Dagli Orti/ De Agostini/ Getty Images

Alexandre le Grand

-600 à -200. Philosophes et conquérants - crédits : Encyclopædia Universalis France

-600 à -200. Philosophes et conquérants

Portrait d’Alexandre le Grand - crédits : T. Baggett/ Fotolia

Portrait d’Alexandre le Grand

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