SANGUINETTI ALEXANDRE (1913-1980)
Né en 1913 au Caire, Alexandre Sanguinetti est bachelier en droit et licencié ès lettres quand survient la guerre où il s'illustre dans les commandos d'Afrique en perdant une jambe à l'île d'Elbe. Son rang est modeste : il n'est ni français libre, ni spécifiquement gaulliste et, pas plus à ce moment-là qu'à un autre n'apparaît dans les Mémoires du général de Gaulle. Rien ne semble, d'ailleurs, le porter vers la politique sinon, sans doute, son élan vital et sa conscience des drames vécus et à venir. Après un bref passage au cabinet de François de Menthon, ministre de l'Économie en 1946, c'est en fait sur les associations d'anciens combattants qu'il se polarise, sa perspective n'étant pas tellement leurs intérêts moraux ou financiers, mais le levier civique qu'ils peuvent constituer. À cet égard, point de démagogie ! Lorsqu'en 1966 il sera nommé précisément ministre des Anciens Combattants, c'est beaucoup plus leurs devoirs que leurs droits qu'il rappellera à ses vieux camarades de combat, ce qui – bien entendu – n'ira pas sans soulever quelques tollés.
En attendant, le problème de l'Algérie se profile, qui le conduit à se lier, contre la politique de la IVe République, d'abord à Jacques Soustelle, au sein de l'Union pour le salut et le renouveau de l'Algérie française, ensuite à Me Biaggi, animateur du Front populaire révolutionnaire. En même temps, le voilà secrétaire général du Comité d'action des associations d'anciens combattants qui milite pour un changement de régime et préconise le retour au pouvoir du général de Gaulle, considéré comme seul capable de faire prévaloir une solution nationale outre-Méditerranée. Du même coup, il participe en 1958 à la création de l'U.N.R., au côté de son ami d'enfance Roger Frey dont il devient jusqu'en 1962 le collaborateur personnel à divers postes ministériels. Comme lui, et comme Michel Debré, il se rallie donc à l'idée de l'indépendance algérienne, ce qui – au titre de directeur de cabinet du ministre de l'Intérieur – le mène à organiser, à partir du putsch d'Alger, la lutte contre l'O.A.S. Le virage est notable : comme bien des gaullistes, Sanguinetti quitte, ce faisant, la ligne classique de la droite nationale pour adopter une philosophie teintée de légitimisme et de jacobinisme. Il n'ira pas jusqu'au gaullisme de gauche pour autant, disant, en plaisantant certains de ses adeptes connus pour leur fortune : « C'est un luxe que je ne peux, quant à moi, me payer ! »
C'est après son élection, en novembre 1962, comme député U.N.R. de la 26e circonscription de la Seine (XVIIIe arrondissement) qu'il se spécialise dans les problèmes militaires au sein de l'Assemblée, en devenant rapporteur du budget des Armées. Ministre en 1966, il est battu aux élections de 1967, mais élu à Toulouse l'année suivante au titre de l'U.D.R. Président de la commission de la Défense nationale jusqu'en mars 1973, date à laquelle il subit un nouvel échec aux élections législatives, il devient en octobre de la même année secrétaire général du mouvement gaulliste à la place d'Alain Peyrefitte. Comme tel, il assumera une part de la responsabilité du ralliement de l'U.D.R. à la candidature de Valéry Giscard d'Estaing au soir du premier tour de l'élection présidentielle de 1974. « J'ai eu la tentation de prôner l'abstention, devait-il dire depuis, mais je n'aurais guère déplacé plus de trois cent mille voix, et si Mitterrand l'avait emporté, jamais notre électorat ne nous l'aurait pardonné ! » Il est vrai qu'il lui arrivait de confier, en privé, à certains compagnons finalement passés dans l'opposition : « J'aurais fait pareil, si j'avais été, comme vous, moins âgé ! ».[...]
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Écrit par
- Pierre DABEZIES : professeur à l'université de Paris-I, ancien président de la Fondation pour les études de défense nationale
Classification
Média