POUCHKINE ALEXANDRE SERGUEÏEVITCH (1799-1837)
L'œuvre de la maturité
En juin 1824, Pouchkine a été assigné à résidence dans le domaine paternel de Mikhaïlovskoïé, près de Pskov. Bien qu'il ait été tenu à l'écart de la conspiration qui, à la mort d'Alexandre Ier, a abouti, en décembre 1825, à une tentative de coup d'État sévèrement réprimée par le nouveau tsar Nicolas Ier, Pouchkine ne reniera jamais les décembristes, dont quelques-uns sont ses proches amis. Cependant, s'il a partagé leurs aspirations libérales, il ne semble pas qu'il ait fait siennes leurs illusions : leur échec contribuera encore à lui faire considérer la situation politique de la Russie en historien réaliste plus qu'en révolutionnaire. D'autre part, il se sentira personnellement engagé vis-à-vis de Nicolas Ier qui, en 1826, a mis fin à son exil et lui a proposé d'être son seul censeur, le plaçant en fait sous le contrôle du comte Benkendorf, chef de la police politique. Cela, du reste, ne le délivrera ni des enquêtes ouvertes sur des œuvres plus anciennes, réputées subversives (comme l'Ode à André Chénier) ou impies (comme La Gabriéliade, Gavriiliada, proche de la Guerre des dieux de Parny), ni d'une surveillance policière secrète.
Son mariage en 1831 avec la belle Nathalie Gontcharova ne fait qu'accroître une dépendance humiliante à l'égard de la cour, où il doit accepter en 1833 les fonctions, inhabituelles à son âge, de « Kammerjunker ». Cette dépendance si contraire à l'idée qu'il se fait de la dignité du poète et du caractère sacré de sa mission est à l'origine du duel où il trouve la mort, victime d'un jeune courtisan français, le baron d'Anthès, qu'il a provoqué à la suite de lettres anonymes calomnieuses.
L'un des premiers écrivains russes à vivre, au moins partiellement, de sa plume, Pouchkine s'est employé, depuis son retour d'exil, à animer la vie littéraire de son pays et à en élever le niveau : les notes, comptes rendus, études critiques qu'il écrit pour la Gazette littéraire de son ami Delvig (1830-1831), puis pour Le Contemporain qu'il fonde et dirige (1836-1837), sont, plus encore que d'un critique, d'un éducateur soucieux d'informer le public, d'élargir son horizon, d'affiner son goût.
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Écrit par
- Michel AUCOUTURIER : professeur à l'université de Paris-Sorbonne et à l'École normale supérieure
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