ALEXANDRIE
À l'ouest du delta du Nil et à l'abri de ses inondations, Alexandrie est construite sur un cordon littoral séparant la Méditerranée du lac Mariout (ancien lac Maréotis). L'île de Pharos fut rattachée au continent par une digue de 1 300 mètres environ (Heptastade) construite par Ptolémée Sôter (~ ive-~ iiie s.), ce qui détermina deux ports : le Portus Magnus, à l'est, et l'Eunostos (devenu le grand port actuel), à l'ouest. La ville, déjà très dynamique à l'époque hellénistique, devint une énorme capitale cosmopolite à l'époque romaine, dépassant peut-être 500 000 habitants. Son déclin, provoqué par les troubles du iiie siècle, se poursuit après la conquête arabe (642). Toutefois, Alexandrie connut encore une époque prospère en devenant, aux xive et xve siècles, le grand centre de redistribution des épices en Europe grâce à l'alliance vénitienne. La découverte de la route du cap de Bonne-Espérance, les actions des Portugais en mer Rouge et la conquête turque en 1517 mirent fin à cette prospérité. Bonaparte débarqua en 1798 dans une bourgade de 5 000 à 7 000 habitants.
L'expédition française ouvrit pour Alexandrie l'ère de la régénération. Méhémet-Ali et ses successeurs la développèrent et l'embellirent. Cet essor ne fut pas entravé par les bombardements et incendies de 1882, qui préludèrent à l'occupation anglaise. Au contraire, depuis l'ouverture du canal de Suez (1869), elle devint la principale place de commerce et le premier port de l'Égypte. Une communauté cosmopolite s'y établit (Grecs, Italiens, Français, « Levantins »), renforcée par des minoritaires égyptiens (coptes et juifs). L'essentiel de cette brillante société a disparu avec le régime nassérien, et la ville s'est nettement prolétarisée avec l'afflux de réfugiés venus de Suez et de Port-Saïd depuis 1967.
La dégradation est ainsi sensible dans certains quartiers qui faisaient autrefois d'Alexandrie l'une des plus belles villes du monde. Le port d'Alexandrie, bien relié à l'intérieur, a le quasi-monopole des exportations égyptiennes (coton) et il importe les trois quarts des produits étrangers. Alexandrie est une ville industrielle (raffineries, cimenteries, constructions navales, textiles, cuir, papier, industries alimentaires, chimiques et mécaniques). C'est également une ville touristique qui attire en été, par son climat et ses possibilités balnéaires, un grand nombre de Cairotes aisés. Sa population était de 4 110 000 habitants lors du dernier recensement de 2006. Enfin, la ville possède une grande université et, depuis 2002, une nouvelle bibliothèque, construite à l'emplacement de la Bibliothèque antique, grâce aux efforts conjoints de l'U.N.E.S.C.O. et de l'État égyptien. Complétée par plusieurs musées (des Sciences, des Antiquités, des Manuscrits) et par des centres de recherche, la Bibliotheca Alexandrina, destinée à accueillir 8 millions d'ouvrages, se veut une ouverture sur le monde et un grand centre culturel au cœur du bassin méditerranéen.
Histoire d'Alexandrie
Comme Rome, comme Athènes, comme Byzance, Alexandrie n'est pas seulement une ville prestigieuse : c'est une civilisation, c'est-à-dire la marque imprimée par certains hommes à une société qui dépasse le cadre géographique que constitue l'Égypte et le cadre historique que définit la période allant de la fondation de la ville par Alexandre, en 331 avant J.-C., à la révolte de ses habitants, sous l'empereur Dioclétien, en 298 après J.-C. Alexandrie résume un monde, incarne un certain mode de vie, représente une forme d'art et de pensée : être « Alexandrin », ce n'est pas seulement être d'Alexandrie ; c'est se définir par rapport à des valeurs qui prirent d'abord un sens dans la capitale des Ptolémées, successeurs d'Alexandre[...]
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Écrit par
- André BERNAND : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Dijon
- Jean-Yves EMPEREUR : directeur de recherche au C.N.R.S., directeur du Centre d'études alexandrines
- Jean-Marc PROST-TOURNIER : agrégé de l'Université, professeur à l'Institut de géographie du Proche et Moyen-Orient, Beyrouth
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Médias
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