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ALEXEÏEV VASSILI (1942-2011)

Le Soviétique Vassili Alexeïev, double champion olympique, titulaire de quatre-vingts records du monde et de vingt-deux titres mondiaux, considéré en son temps comme l'homme le plus fort du monde – une distinction que lui attribua le magazine américain Sport Illustrated dont il fit la une en 1975 et que personne après lui n'a pu revendiquer –, demeure l'incarnation absolue de l' haltérophilie. Dans les années 1970, à une époque où ce sport, miné par les problèmes de dopage, n'intéressait plus grand monde, les foules se pressaient quand cet Hercule caricatural (1,88 m, 153 kg) se produisait. Grâce à lui, l'haltérophilie trouva un nouveau souffle – il est vrai très provisoire.

Vassili Alexeïev fut en effet à la fois un héros soviétique, comme le Parti communiste savait les célébrer, et un cabot. Ce colosse au sourcil épais, aux favoris fournis, toujours vêtu d'un fin maillot rouge cerclé d'une ceinture blanche qui ne cachait rien de son embonpoint faisait de chacune de ses tentatives contre le record du monde un spectacle : il entrait en scène comme une star, poudrait ses mains de magnésie avec une préciosité cocasse, puis se concentrait devant la barre ; il soulevait alors celle-ci, son visage devenait écarlate, son corps semblait pouvoir se briser à tout moment ; une fois vainqueur de ce duel contre la fonte, il se retirait en coulisse, l'air dédaigneux.

Vassili Alexeïev est né le 7 janvier 1942, à Pokrovo-Chichkino, un village de la région de Riazan. Ce fils de mineur s'essaye au volley-ball. À dix-neuf ans, il change d'orientation sportive, suivant les conseils d'un recruteur d'hommes forts impressionné par la détente de ce jeune homme à la corpulence hors norme. Dès lors, soulever de la fonte devient sa seule occupation ou presque : à raison de 4 à 6 heures par jour, dix mois par an durant, il manie des barres. Il s'astreint par ailleurs à un régime alimentaire bien particulier, digne de Gargantua – la légende dit que nulle journée ne se passait sans qu'il ait avalé un demi-kilo de caviar.

Champion d'U.R.S.S. en 1968, Vassili Alexeïev établit son premier record du monde le 24 janvier 1970. Le 18 mars de la même année, il marque les esprits en portant le record du monde du total olympique (aux trois mouvements) à 600 kg. Toujours en 1970, il devient champion du monde des lourds : il redonne à l'U.R.S.S. un titre qui semblait revenir de droit à ce pays depuis les années 1950, et que l'Américain Joe Dube lui avait « chipé » l'année précédente. Dès lors, il devient invincible. En 1972, aux jeux Olympiques de Munich, l'Allemand de l'Ouest Rudolph Mang prétend le défier dans la toute nouvelle catégorie des super-lourds (plus de 110 kg), qui semble pourtant avoir été créée sur mesure pour le colosse soviétique : Alexeïev réalise 640 kg aux trois mouvements, quand Mang, humilié, en reste à 610 kg. Les records – chacun lui rapportant 1 000 dollars et plus – et les titres s'accumulent. En 1973, le format de l'haltérophilie se modifie, avec la suppression du développé : Alexeïev établit le premier record du monde aux deux mouvements (arraché et épaulé-jeté), avec 417,5 kg. Aux Jeux de Montréal, en 1976, débarrassé de son concurrent le plus sérieux, le Bulgare Hristo Platchkov (forfait sans doute pour éviter un contrôle antidopage), il s'adjuge une nouvelle médaille d'or (440 kg), son dauphin, l'Allemand de l'Est Gerd Bonk (405 kg), faisant figure de pâle faire-valoir. En 1977, il bat ses deux derniers records du monde : 445 kg au total olympique, 256 kg à l'épaulé-jeté – des performances qui lui auraient permis d'être médaillé d'argent aux Championnats du monde en 2011 !

Décoré de l'ordre de l'Insigne honneur soviétique en 1970, de l'ordre de[...]

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Écrit par

  • : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs

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