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ALEXIES

Les pathologies acquises de la lecture

Selon leur localisation et leur étendue, les lésions cérébrales perturbent différemment les circuits cérébraux qui sous-tendent l’activité de lecture. Les déficits affectant cette dernière prennent des formes diverses qui sont associées ou non à d’autres altérations du langage (comme l’écriture).

Ainsi, certains patients présentent un déficit de l’identification des lettres. Dans les cas les plus sévères, les patients disent se trouver devant des signes étranges, alors qu’ils sont capables de les copier avec la plus grande précision comme n’importe quel dessin. Il n’est pas rare que certains d’entre eux arrivent à identifier les lettres les yeux fermés pour peu qu’il leur soit permis d’en tracer les contours. Cette préservation de la mémoire motrice des lettres explique que ces patients soient capables d’écrire normalement alors que leur reconnaissance visuelle est altérée. Dans d’autres cas, les patients reconnaissent les configurations de traits qui composent les vingt-six lettres de notre alphabet et les distinguent d’autres signes tels que les chiffres ou d’autres symboles graphiques sans pouvoir les identifier spécifiquement. Enfin, dans les formes les moins sévères, l’identification des lettres est possible mais lente, avec d’occasionnelles confusions entre lettres de forme proche (par ex. Q confondu avec O).

D’autres troubles de la lecture traduisent une « altération du mécanisme d’appréhension parallèle des lettres ». L’identification des lettres est alors fonctionnelle mais se réalise de manière sérielle et non plus parallèle. Ce déficit a pour effet d’accroître le temps de lecture, et ce d’autant plus que les mots à lire sont longs. Or, chez le lecteur habile, et jusqu’à six lettres, les temps de reconnaissance des mots sont constants.

Lorsque la procédure d’assemblage est altérée, les patients rencontrent des difficultés à convertir les lettres en sons alors qu’ils identifient parfaitement les lettres. En revanche, ils lisent à haute voix et comprennent assez bien les mots écrits fréquents, réguliers ou irréguliers. Il est alors supposé que cette habileté préservée résulte de la préservation de la voie d’adressage. Cependant, il n’est pas rare de relever quelques erreurs de lecture de mots peu fréquents ou de mots fonctionnels (« chacun » est lu « aucun »).

À l’inverse, d’autres patients présentent des difficultés à traiter les mots par la procédure d’adressage. À défaut de celle-ci, les mots sont traités par la procédure d’assemblage préservée. L’accès à leur signification et à leur prononciation est alors tributaire des conversions lettres/ sons. Si cette voie autorise la lecture des mots réguliers et des pseudo-mots, elle induit les patients en erreur quand ils lisent des mots irréguliers. Ceux-ci sont alors régularisés et deviennent sources d’erreurs de compréhension (« pouls » lu « poule » donnant erronément accès au sens d’un animal de basse-cour) ou traités comme des mots sans signification si le résultat des conversions ne correspond pas à un mot de la langue (par ex. « chorale »). Selon le même principe, ces patients auront tendance à considérer comme mots des pseudo-mots écrits qui se prononcent comme des mots (par ex. « aimaussion »).

Enfin, les procédures d’assemblage et d’adressage se trouvent simultanément altérées chez certains patients qui sont alors incapables, dans les formes les plus sévères, de lire à haute voix les pseudo-mots. Ils leur substituent un mot formellement proche (par ex. « dibran » est lu « divan ») ou ne fournissent aucune réponse. Si leur lecture des mots est meilleure que celle des pseudo-mots, elle montre des signes d’altération. Dans ces formes mixtes de dyslexie, les erreurs apparaissent surtout quand la lecture concerne des mots peu fréquents,[...]

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Écrit par

  • : docteure en psychologie, professeure à la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation, université catholique de Louvain (Belgique)

Classification

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