ALEXIS II (1929-2008) patriarche de Moscou (1990-2008)
Patriarche de l'Église orthodoxe russe de 1990 à 2008, Alexis II est issu d'une vieille famille de hobereaux prussiens, les von Ridiger, implantée à Tallinn, la capitale de l'Estonie, et convertie à l'orthodoxie. Né le 23 février 1929, Alexeï Mikhaïlovitch Ridiger grandit dans le milieu des Russes blancs exilés dans les pays Baltes indépendants depuis 1918. Son père était pope. En 1944, l'Estonie est occupée par l'Armée rouge et intégrée à l'U.R.S.S. Alors que son père est déporté en Sibérie, le jeune Alexis est proche des ecclésiastiques qui liquident l'église orthodoxe autocéphale d'Estonie pour le compte du patriarcat de Moscou. Ce dernier bénéficie de l'appui bienveillant d'un Staline qui s'est rapproché de l'église orthodoxe en 1941-1942, au nom de « la grande guerre patriotique » contre l'envahisseur allemand. Oubliant que Staline a fait disparaître 600 évêques, 40 000 popes, 120 000 moines et moniales ainsi que 75 000 lieux de culte, il entre au séminaire de Leningrad en 1947, devenant diacre en 1949 pour être ordonné prêtre l'année suivante.
En 1957, le père Alexis devient recteur de la cathédrale de Tartu en Estonie et commence sa rapide ascension dans l'église orthodoxe russe totalement contrôlée par le pouvoir soviétique. En 1961, il divorce pour pouvoir prononcer ses vœux monastiques au monastère de la Trinité Saint-Serge, cœur de l'orthodoxie russe, et devient membre du département des relations extérieures du patriarcat, un département sensible de l'Église, complètement surveillé par le K.G.B. Il aurait travaillé pour ce dernier sous le nom d'agent « Drozdov ». Quoi qu'il en soit, en dehors de la petite « église des catacombes », tout homme d'église en U.R.S.S. devait de gré ou de force collaborer avec le pouvoir. Cette même année, il est nommé évêque de Tallinn et de l'Estonie.
Trois ans plus tard, il devient archevêque et chancelier du patriarcat de Moscou, devenant ainsi membre permanent du saint synode. En 1968, sous Brejnev, il est élu métropolite et vice-président du département des relations extérieures du patriarcat. Ce département gère les relations entre l'Église et l'État. Sous le contrôle du pouvoir soviétique, il s'ouvre par ses nouvelles fonctions aux relations œcuméniques avec les autres Églises chrétiennes d'Orient et d'Occident. De 1987 à 1992, il préside la Conférence des Églises européennes et participe aux travaux du Conseil œcuménique des Églises.
En 1986, il devient métropolite de Leningrad et, dès 1987, soutient ouvertement Mikhaïl Gorbatchev, demandant une révision des rapports Église-État. En juin 1990, il est élu patriarche orthodoxe de Moscou et de toutes les Russies, succédant au vieux patriarche décédé, Pimène. Proche d'Eltsine et surtout de Poutine, Alexis II a beaucoup contribué à la restauration des lieux de cultes et au renouveau de la foi. En 2000, la cathédrale du Christ-Sauveur à Moscou, qui avait été rasée en 1931 sur ordre de Staline, est totalement reconstruite. En moins de vingt ans, l'Église orthodoxe russe a retrouvé sa puissance perdue. Des centaines d'églises et de monastères ont été restaurés. 10 000 lycées orthodoxes ont ouvert leurs portes et le nombre de paroisses est passé de 7 000 à 27 000. Autre réussite à mettre à son compte, en avril 2003, il a su renouer avec l'Église russe de la diaspora qui avait rompu avec Moscou après la révolution, accusant le patriarcat d'être à la solde des bolcheviks. Finalement, en mai 2007, les deux branches de l'Église russe se sont retrouvées.
Mais l'œcuménisme d'Alexis II a ses limites. Il a dénoncé avec force le prosélytisme des catholiques uniates (chrétiens de rite orthodoxe ayant reconnu l'autorité du Vatican), particulièrement[...]
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Écrit par
- Christophe CHICLET
: docteur en histoire du
xx e siècle de l'Institut d'études politiques, Paris, journaliste, membre du comité de rédaction de la revueConfluences Méditerranée
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