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ALEXITHYMIE

L’alexithymie est un trait de personnalité stable qui se caractérise par une difficulté à identifier et à distinguer les états émotionnels, une difficulté à les verbaliser, une vie imaginaire réduite, et un mode de pensée tourné vers les aspects concrets de l’existence au détriment de leurs aspects affectifs (« pensée opératoire »). Ce trait est un peu plus marqué dans les cultures collectivistes et pour des niveaux d’éducation et de revenus plus faibles. Les étiologies sont nombreuses et complémentaires (psychodynamiques, développementales, cognitives, traumatiques, génétiques, neurologiques) et pourraient varier en fonction du genre.

Si les premières études suggéraient une vulnérabilité spécifique pour les maladies psychosomatiques, les conceptions actuelles considèrent la présence de caractéristiques alexithymiques comme un facteur non spécifique de vulnérabilité psychopathologique et somatique. Les conséquences psychologiques sont d’ordre individuel (dépression, addictions, troubles alimentaires), mais également interpersonnel (faible attractivité sociale, soutien social restreint, sentiment de solitude et de rejet, manque d’empathie). Parmi les conséquences somatiques, on peut notamment citer la sphère cardio-vasculaire (hypertension) ou gastro-intestinale (syndrome du côlon irritable). Des données immunitaires et endocriniennes suggèrent qu’à long terme les traits alexithymiques favoriseraient une réaction de stress chronique.

Une tentative d’explication concerne l’existence d’une dissociation entre l’activité physiologique réelle et sa perception subjective (déficit de conscience intéroceptive liée aux expériences émotionnelles et non émotionnelles). Cette hypothèse est corroborée par des études d’imagerie fonctionnelle qui montrent que les zones cérébrales impliquées dans le traitement émotionnel et liées à la conscience de soi (cortex cingulaire antérieur, insula, cortex somatosensoriel) sont moins activées chez les sujets présentant un score élevé d’alexithymie. En ce qui concerne le traitement cognitif de l’émotion, on observe chez les sujets alexithymiques des déficits au niveau des traitements automatiques (non conscients) sous la forme d’une moins bonne détection des signaux de menace et d’une plus faible capacité de discrimination entre des expressions faciales émotionnelles. Des déficits sont également observés au niveau des traitements contrôlés (conscients) qui se traduisent par des réactions affectives subjectives de moindre amplitude et par des capacités réduites pour détecter, identifier et rappeler les stimuli émotionnels.

La présence de traits alexithymiques prédit de moins bons résultats dans le traitement d’affections mentales et physiques, ce qui nécessite des prises en charge spécifiques. La psychoéducation, les techniques corporelles ou l’hypnose sont recommandées.

— Olivier LUMINET

Bibliographie

O. Luminet, N. Vermeulen & D. Grynberg, L’Alexithymie. Comment le manque d’émotions peut affecter notre santé, coll. Le point sur, De Boeck, Bruxelles, 2013.

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Écrit par

  • : docteur en psychologie, directeur de recherche au Fonds de la recherche scientifique de Belgique, professeur à l'université catholique de Louvain et à l'université libre de Bruxelles (Belgique)

Classification

Autres références

  • TROUBLES SOMATIQUES FONCTIONNELS

    • Écrit par et
    • 3 343 mots
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