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FABRE-LUCE ALFRED (1899-1983)

Né le 16 mai 1899, Alfred Fabre-Luce est le petit-fils d'Henri Germain, le fondateur du Crédit Lyonnais et le fils d'un banquier. Ses études ? Licence de lettres, de droit et un diplôme de sciences politiques. Sa carrière ? Le Who's who la résume très brièvement : « Attaché d'ambassade (1919-1920) puis homme de lettres et journaliste. » Auteur d'une quarantaine d'ouvrages et de nombreux articles, Alfred Fabre-Luce a en effet traversé le siècle en observant le monde et ceux qui le façonnent, en faisant part à ses lecteurs de ses réflexions toujours pleines d'intelligence et d'originalité. Sans craindre de déranger.

Dès son premier livre, La Victoire, Alfred Fabre-Luce se fait remarquer. Diplomate pendant quelques mois – il fut attaché d'ambassade à Londres après la Grande Guerre –, il désigne cinq ans plus tard les responsables du conflit, n'hésitant pas à mettre en cause Raymond Poincaré lui-même. Son deuxième livre ne passera pas non plus inaperçu. Pendant la Seconde Guerre mondiale, Alfred Fabre-Luce publie Le Journal de la France. En juin 1943, il est arrêté à la suite de la publication du troisième tome de l'ouvrage. La Gestapo n'apprécie pas en effet sa liberté de ton. Pas plus que cette dédicace envoyée à un ami lecteur : « Ce livre d'un franc-tireur... » Expression ambiguë s'il en est. Les occupants souhaitent aussi connaître ses sources sur les événements d'Italie qu'il commente en connaisseur. Bilan : quatre mois de prison au Cherche-Midi d'abord, puis à Neuilly, où il a pour voisin de détention le général Delestraint. « Pourquoi les Allemands ne vous ont-ils pas fusillé ? » Cette fois, c'est un juge d'instruction français qui l'interroge. Arrêté pour le même livre à la Libération, l'auteur (qui avait écrit en 1944 : « Nous allons enfin connaître nos nazis : ce sont les durs de la Résistance ») doit s'expliquer. Libéré, puis à nouveau recherché par les autorités françaises, il se réfugie en Suisse jusqu'en 1946.

L'écrivain ne retournera plus en prison mais il aura encore quelques ennuis avec la justice et de solides polémiques avec ses adversaires. Gaulle deux en 1958 et d'autres livres ensuite résonneront de son antigaullisme viscéral. Haute Cour sera même saisi en 1962. Bien plus tard, son livre de politique-fiction Les Cent Jours de Mitterrand (1977) fera l'objet, selon lui, d'une « tentative de censure » de la part de l'entourage de Jacques Chirac.

Mais son anticonformisme ne se limite pas au terrain politique. Sur le plan religieux et philosophique, il fait preuve de son indépendance d'esprit habituelle. Dans sa Lettre ouverte aux chrétiens, il critique l'encyclique Humanae vitae, « une grande occasion manquée » par rapport à la libération des femmes. Il souhaite « l'envahissement tranquille des synodes, des associations catholiques, des lieux de culte par des hommes animés du nouvel esprit ». Pour Alfred Fabre-Luce, « la véritable foi est une référence morale vécue ». Élégant, raffiné, Alfred Fabre-Luce est un homme bien né. Bien marié aussi, puisqu'il épousa Mlle de Faucigny-Lucinge. Son anticonformisme s'accommode fort bien de l'esprit de famille. En 1974, l'observateur détaché se mue en partisan. C'est que son neveu par alliance, Valéry Giscard d'Estaing, est candidat aux élections présidentielles. Un candidat qui n'incarne pas seulement les idées d'Alfred Fabre-Luce, comme en témoigne le chapitre intitulé « Le Sacre » dans son livre Les Cent Premiers Jours de Giscard (1975). L'écrivain-témoin y raconte le « dîner des cousins », tenu à l'invitation du prince de Faucigny-Lucinge à l'Interallié, au soir du deuxième tour de l'élection présidentielle, le 19 mai 1974.[...]

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