ALIÉNOR D'AQUITAINE (1122 env.-1204)
Fille de Guillaume X, duc d'Aquitaine. Duchesse à la mort de son père (1137), elle fut mariée dès son avènement au prince Louis, qui montait, deux semaines plus tard, sur le trône de France sous le nom de Louis VII. Le duché demeura cependant distinct du domaine royal. L'union était mal assortie, la légèreté et la sensualité d'Aliénor s'accordant mal avec la dévotion ascétique du roi. Les prétentions d'Aliénor à gouverner son duché décevaient, d'autre part, les conseillers du roi qui, comme Suger, avaient envisagé une assimilation rapide de cette principauté au royaume.
Pendant la deuxième Croisade (1147-1149), où elle accompagna son mari, Aliénor eut, avec son oncle Raymond de Poitiers, prince d'Antioche, une aventure dont la seule chose certaine est qu'elle ridiculisa le roi. C'est ce qui poussa Louis VII à commettre une faute politique lourde de conséquences pour l'avenir de l'Orient latin : il abandonna l'idée d'une expédition dirigée contre Édesse, qui aurait soulagé la principauté d'Antioche et levé par là même la principale menace qui pesait sur la Terre sainte, et il préféra s'engager dans une expédition sans intérêt vers Jérusalem.
À leur retour en France, Aliénor continua de ridiculiser son mari, se laissant courtiser par Henri Plantagenêt, comte d'Anjou. Le roi ne pouvait éviter de demander le divorce, que prononça, en 1152, un synode d'évêques complaisants. Aliénor épousa alors Henri Plantagenêt, devenant ainsi duchesse de Normandie et reine d'Angleterre (1154).
Plus attirée par le duché d'Aquitaine, qu'elle continua de gouverner avec efficacité, même après avoir investi de cette charge son fils Richard Cœur de Lion (1169), que par le séjour insulaire, Aliénor anima à Poitiers une cour raffinée et brillante. Mais elle joua surtout un rôle politique considérable, soutenant contre son mari Henri II l'un ou l'autre de leurs fils, pour le plus grand profit du roi de France qui tirait parti de ces dissentiments. Henri II la fit enfermer en 1173 dans un couvent d'où elle ne sortit que lorsque son fils Richard monta sur le trône en 1189. Celui-ci fit grand cas de l'expérience politique de sa mère ; c'est à elle qu'il confia la régence de son État pendant la troisième Croisade (1190). À la mort de Richard, Aliénor eut une part décisive dans l'avènement de son dernier fils, Jean sans Terre (1199), malgré les droits éventuels d'Arthur de Bretagne, fils de son fils aîné. Elle dirigea ensuite la résistance royale contre la rébellion des grands feudataires du duché, que soutenait Philippe Auguste. Malgré son âge, elle déploya une remarquable énergie dans les derniers soubresauts de l'indépendance aquitaine, qui disparut peu après sa mort, grâce à l'habileté de Philippe Auguste qui exploita les erreurs politiques de Jean sans Terre.
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Écrit par
- Jean FAVIER : membre de l'Institut, directeur général des Archives de France
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