ALIMENTATION (Aliments) Risques alimentaires
Hygiène structurale
À côté des nuisances exogènes, l'alimentation risque d'apporter au consommateur des nuisances liées à la denrée elle-même. Deux cas bien différents sont à distinguer : celui des produits naturellement toxiques et celui des produits normaux au sein desquels la technologie a induit la formation de produits toxiques.
Les nuisances de constitution
Certains produits naturellement toxiques sont bien connus, et leur introduction dans l'alimentation ne peut être qu'accidentelle : c'est le cas, bien classique, des champignons vénéneux.
Un autre exemple, sans doute plus intéressant parce que moins connu, est celui des poissons toxiphores. Ceux-ci se divisent en trois groupes selon l'organe dont la consommation peut être dangereuse : chair musculaire (ichtyo-sarco-toxisme), gonades et laitance (ichtyo-toxisme), foie (hépato-toxisme).
L'ichtyo-sarcotoxisme peut se manifester sous deux formes essentielles. La forme ciguatérique, avec ses troubles digestifs, neurologiques et généraux, mortels dans 1 à 2 p. 100 des cas, peut être transmise par tous les poissons des mers chaudes, mais surtout dans les régions insulaires, où la maladie cause des dommages économiques considérables (Hawaii, Polynésie française). Il est important de noter que la ciguatéra s'étend actuellement à des archipels jusqu'alors préservés. Peut-être la toxine responsable, inhibitrice des cholinestérases, est-elle due au développement dans les poissons de bactéries ou de champignons toxiques, concentrés au long de la chaîne alimentaire. La forme tétrodotoxique réalise la plus grave de toutes les intoxications. Fréquemment mortelle, elle est véhiculée par les tétrodons (poissons-globes) et les diodons, et représente 60 p. 100 des intoxications alimentaires au Japon et dans le Pacifique.
L'ichtyo-toxisme est provoqué par la laitance de poissons d'eau douce, et ses manifestations pseudo-cholériques avec troubles psychiques et convulsions guérissent en quelques jours. Enfin, l'ichtyo-hépato-toxisme, dû à l'absorption de foie, particulièrement de requins, est sans gravité.
L'extension de l'aire des poissons vecteurs, la thermo-stabilité des toxines, la gravité de certaines intoxications, enfin le rôle assigné au poisson dans certains programmes de supplémentation protéique dans le Tiers Monde font tout l'intérêt d'une étude approfondie des poissons toxiphores.
Plus répandus sont sans doute les anti-aliments naturels, dont la découverte a résulté de la non-concordance de la mesure biologique de la valeur nutritive de certains aliments avec les données théoriques. Selon leurs modalités d'action, ces substances sont divisées en trois groupes : antiprotéinogénétiques, antiminéralisantes et antivitamines.
La plupart des aliments naturels riches en protéines contiennent des substances antiprotéinogénétiques, capables soit de limiter l'activité des enzymes protéolytiques du tube digestif, soit de réduire l'absorption de certains acides aminés, soit de diminuer l'utilisation anabolique du matériel azoté de la ration ou d'augmenter les besoins de l'organisme en certains acides aminés. Ainsi le blanc d'œuf contient une antiprotéase, le glycoprotéide soufré, détruite par la coagulation thermique. Le lait possède une antitryptase, également sensible à la chaleur et qui diminue l'action de la trypsine sur le lait cru. De même, des végétaux tels que le soja, le haricot, la lentille et aussi le blé possèdent des facteurs antithrypsiques thermolabiles plus ou moins intenses. Mais la chaleur ne détruit pas d'autres anti-aliments, tels que ceux qui sont contenus en particulier dans la fève et responsables du favisme, caractérisé par un syndrome hémolytique rapide.
Parmi les antiminéralisants, l'un des plus connus est l'acide inositohexaphosphorique,[...]
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Écrit par
- Jean-Pierre RUASSE : nutritionniste, ex-assistant de médecine préventive à la faculté de médecine, président de l'association biologie-alimentation-santé
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