- 1. Grandes étapes de l'évolution de l'alimentation
- 2. Croissance économique et changement alimentaire
- 3. Aliments en croissance, aliments en décroissance
- 4. Différenciation croissante des produits alimentaires
- 5. Alimentation et santé : les problèmes de l'abondance
- 6. Hétérogénéité des comportements : des différences et des inégalités
- 7. Bibliographie
ALIMENTATION (Comportement et pratiques alimentaires) Évolution de la consommation
Différenciation croissante des produits alimentaires
La stabilisation quantitative, qui se manifeste au niveau des grands groupes d'aliments dans les pays développés, n'est évidemment pas le signe d'un arrêt de l'évolution de la consommation alimentaire. Ce sont désormais moins des familles d'aliments qui suscitent la demande – comme c'était encore le cas pour la viande, par exemple, dans les années 1950 – que des produits ayant des avantages spécifiques, par exemple des aliments faciles à préparer et à consommer, plus élaborés ou particulièrement goûteux, ou bénéficiant d'une image positive dans le domaine de la santé.
Deux facteurs fondamentaux sont à l'arrière-plan de ces évolutions : le jeu des prix relatifs et les stratégies de différenciation des produits.
Les ménages sont toujours sensibles aux variations des prix alimentaires et, si la croissance du revenu a déplacé la demande vers des groupes d'aliments plus chers (des céréales et des féculents vers les produits d'origine animale), l'augmentation de la consommation a concerné préférentiellement les produits dont les prix relatifs baissaient (porc et volailles plutôt que viande bovine, conserves plutôt que produits frais, par exemple). Ce mécanisme très puissant explique une bonne partie de l'évolution de la structure des achats à l'intérieur de chacune des grandes familles d'aliments depuis le début des années 1950. En effet, en dépit de la saturation relative de la demande, la sensibilité aux prix relatifs est toujours significative. Elle pousse les producteurs à améliorer sans cesse leur productivité et à différencier leurs produits pour tenter d'échapper, au moins pendant un temps, à la concurrence par les prix.
La différenciation des produits est devenue de plus en plus nécessaire sur des marchés quantitativement saturés, où l'augmentation de la consommation d'un nouvel aliment signifie presque toujours la diminution de la consommation d'un autre. Cette limitation ne porte pas seulement sur les quantités mais aussi sur les dépenses. L'accroissement de la demande pour des aliments de meilleure qualité intervient, en effet, dans le cadre d'un budget alimentaire qui devient pratiquement stable (l'élasticité de la dépense alimentaire totale par rapport au revenu tend progressivement vers zéro). En France, par exemple, depuis 1960, la substitution des vins d'appellation aux vins de consommation courante s'est réalisée sans accroissement du volume des dépenses consacrées aux achats de vin et, donc, avec une très forte diminution des quantités consommées. L'apparition de phénomènes de saturation des quantités, puis des dépenses, dans toutes les familles d'aliments, généralise la concurrence à l'ensemble de la consommation alimentaire : aucun produit n'étant à l'abri de ses substituts proches ou lointains, tous les producteurs doivent s'efforcer de différencier leurs produits et de signaler activement leurs caractéristiques les plus marquantes. C'est la raison pour laquelle on observe à la fois une multiplication des produits et une prolifération des signes de qualité et des allégations de tous ordres. La poursuite prévisible des stratégies de différenciation s'accompagnera nécessairement de politiques actives de signalisation jouant sur l'ensemble des attentes des consommateurs : à côté des signes de qualité classiques (appellations diverses), on observe déjà une multiplication des messages portant sur la santé, un domaine majeur de développement stratégique pour les industries alimentaires.
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Écrit par
- Pierre COMBRIS : directeur de recherche à l'Institut national de la recherche agronomique (I.N.R.A.)
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