- 1. Grandes étapes de l'évolution de l'alimentation
- 2. Croissance économique et changement alimentaire
- 3. Aliments en croissance, aliments en décroissance
- 4. Différenciation croissante des produits alimentaires
- 5. Alimentation et santé : les problèmes de l'abondance
- 6. Hétérogénéité des comportements : des différences et des inégalités
- 7. Bibliographie
ALIMENTATION (Comportement et pratiques alimentaires) Évolution de la consommation
Hétérogénéité des comportements : des différences et des inégalités
Avec l'abondance de l'offre alimentaire, l'impression prévaut aujourd'hui que, dans un pays comme la France, les différences de consommation sont plus liées aux goûts ou aux caractéristiques individuelles (âge, culture alimentaire, taille et composition du ménage, temps disponible...) qu'à l'impossibilité économique d'acquérir les produits. Les stratégies de différenciation des produits et de segmentation des marchés contribuent d'ailleurs à entretenir l'idée d'une alimentation de mieux en mieux adaptée aux besoins des différentes catégories de consommateurs.
Il n'est pourtant pas difficile d'observer la persistance d'inégalités quantitatives directement liées au niveau de revenu des ménages. Par exemple, même si les différences tendent à se réduire, le pain et les pommes de terre sont encore consommés en quantité plus importante par les ménages les plus pauvres. Inversement, les consommations de fruits et de légumes frais deviennent probablement les plus inégalitaires des consommations alimentaires : les écarts entre ménages riches et pauvres ont tendance à augmenter et ils sont loin d'être compensés par les approvisionnements non marchands (les jardins et les échanges directs). La consommation de légumes surgelés est à peine moins inégalitaire. Il n'y a guère que les conserves dont la consommation soit globalement très peu différenciée. On pourrait multiplier les exemples. Dans tous les cas, les tendances à moyen terme sont les mêmes : les inégalités de consommation liées au revenu ne s'atténuent vraiment que pour les aliments dont les prix relatifs ont significativement baissé pendant une période suffisamment longue.
On retrouve là un mécanisme identique à celui qui oriente l'évolution de l'alimentation sur une longue période. Lorsque les revenus réels sont très bas, les prix relatifs des groupes d'aliments sont déterminants et les sources de calories les moins chères (en général les céréales et les féculents) constituent l'essentiel de l'alimentation. Lorsque les revenus réels augmentent, la consommation des aliments de base s'accroît jusqu'à la saturation, puis la consommation se déplace vers les groupes d'aliments plus chers (les produits animaux par exemple), mais toujours en privilégiant les produits dont les prix relatifs sont les moins élevés. Malheureusement, ces aliments ne sont pas nécessairement ceux qui ont les plus grandes vertus nutritionnelles. Ainsi par exemple, en France entre 1960 et 2005, le prix des légumes frais a augmenté de 45 p. 100 de plus que la moyenne des prix alimentaires et le prix du beurre a diminué dans la même proportion.
L'alimentation des pays développés est aujourd'hui placée sous le signe de l'abondance : abondance des produits et abondance de l'information. Dans ces pays, la nourriture est partout disponible, à un coût relativement faible, et sans effort pour le consommateur. Une telle situation est très récente à l'échelle de l'histoire de l'humanité. Nous bénéficions de ses effets positifs, mais nous ne contrôlons pas ses conséquences négatives. En dépit des efforts déployés jusqu'ici, le surpoids et l'obésité continuent en effet de progresser dans les pays développés et apparaissent de plus en plus vite dans les pays en développement qui, par ailleurs, connaissent encore des problèmes de carences. Cela signifie que les déterminants individuels et sociaux des choix et des pratiques alimentaires ne sont pas encore suffisamment bien compris pour que nous soyons en mesure de maîtriser l'évolution de notre alimentation. L'enjeu est aujourd'hui de taille, autant pour les pays développés que pour ceux qui sont engagés sur la voie du développement.[...]
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Écrit par
- Pierre COMBRIS : directeur de recherche à l'Institut national de la recherche agronomique (I.N.R.A.)
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