ALMA (Atacama Large Millimeter/submillimeter Array)
Le 13 mars 2013, au cœur du désert d'Atacama, le radiotélescope A.L.M.A. (Atacama Large Millimeter/submillimeter Array) a été inauguré, en présence de Sebastián Piñera, président de la République du Chili, et des représentants des trois grandes organisations astronomiques – issues d'Europe, d'Amérique du Nord et du Japon – qui ont conduit conjointement le projet. L'instrument, situé à 5 100 mètres d'altitude dans les Andes chiliennes, non loin des frontières argentine et bolivienne, au pied du volcan Cerro Chajnantor (5 640 m), est un interféromètre qui combine 66 télescopes, encore appelés antennes, dispersés sur un plateau d'environ 16 kilomètres de diamètre, le Llano de Chajnantor.
Ces télescopes, grandes paraboles métalliques orientables, recueillent le rayonnement des objets célestes dans un domaine de longueurs d'onde comprises entre 320 micromètres et 3,6 millimètres, formant une transition entre le rayonnement infrarouge lointain et les ondes radio. L'information détectée par chacun des 66 télescopes – ou par une fraction d'entre eux –, pointant le même objet, est transmise par fibre optique à un dispositif électronique central, où elle est analysée. L'image de l'objet observé est alors synthétisée. S'agissant de la résolution angulaire, c'est-à-dire de la capacité à distinguer des détails dans l'image, l'instrument est équivalent à un télescope de taille kilométrique. En raison des dures conditions de vie en altitude, le personnel présent sur le site d'observation est réduit, et l'instrument est commandé depuis une station intermédiaire située à 2 900 mètres, au-dessus de la ville de San Pedro de Atacama.
L'interférométrie, du plateau de Bure à l'Atacama
L'essor de la radioastronomie millimétrique date des années 1980, quand une première génération d'instruments permit de découvrir les propriétés des nuages de gaz et de poussière formant le milieu interstellaire. Les interféromètres du plateau de Bure dans les Alpes françaises (I.R.A.M.), de Nobeyama au Japon, d'Owens Valley en Californie révélèrent la chimie complexe de ces nuages et la diversité des molécules qui s'y trouvaient, leur rôle dans la formation des étoiles et leur évolution au sein des galaxies. Durant la décennie de 1990 le besoin d'une deuxième génération d'instruments, plus puissants, se fit sentir : trois projets parallèles virent alors le jour, en Europe – au sein de l'Observatoire européen austral (E.S.O.) qui achevait au Chili le Very Large Telescope dans le domaine optique –, au Japon et aux États-Unis.
L'Europe s'engagea rapidement dans la recherche d'un site approprié au Chili, qu'elle trouva dans le désert d'Atacama dont les qualités atmosphériques – dues à la sécheresse – sont exceptionnelles pour l'observation à ces longueurs d'onde. Menées de 1997 à 2003, les négociations aboutirent à la conception d'un projet commun : A.L.M.A. Il était relativement aisé de partager le travail et les réalisations industrielles, puisque les 66 antennes finalement retenues pouvaient être réalisées à partir des études initiales faites par chacun des partenaires : soit 12 antennes de 7 mètres de diamètre et 4 antennes de 12 mètres au Japon, 25 en Europe et 25 en Amérique du Nord (États-Unis et Canada). Une nouvelle structure, le Joint Alma Observatory, assure la direction et la gestion du projet, ainsi que la mise en œuvre de l'instrument au bénéfice d'une vaste communauté d'astronomes, en rassemblant les partenaires initiaux auxquels se sont joints l'Academia Sinica (Taïwan) et la république du Chili. L'astrophysicien français Pierre Cox a été nommé directeur d'A.L.M.A. en novembre 2012. Le coût total d'A.L.M.A. est d'environ 1,4 milliard de dollars américains.[...]
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Écrit par
- Pierre LÉNA : professeur émérite de l'université Paris-VII-Denis-Diderot, membre de l'Académie des sciences
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