ALMANACH, estampe
Le mot almanach, d'origine incertaine, apparaît dans l'arabe occidental au xiiie siècle ; il désigne d'abord une éphéméride où figurent les positions du soleil et de la lune. Avec l'invention de l'imprimerie et de l'estampe, ce type de calendrier va se développer et se diffuser très largement, sous deux formes. La première est celle d'un livret comprenant le calendrier proprement dit, enrichi de conseils pratiques et de prédictions. La seconde est celle d'une feuille volante, destinée à être placée sur un mur, où le calendrier est accompagné d'idéogrammes et d'une image pieuse ou satirique. Ces deux formes portent le nom usuel d'almanachs, mais la seconde est aussi appelée almanach illustré, calendrier mural, almanach ou calendrier mural illustré.
C'est principalement en France que l'art du calendrier mural illustré s'est développé, même si l'on rencontre quelques calendriers muraux en Allemagne et aux Pays-Bas. Très peu représentés aux xve et xvie siècles, ils restent rares sous le règne de Louis xiii (env. 20 pièces connues). En effet, il faut attendre non seulement que la taille-douce s'installe à Paris et que les officines éditoriales et commerciales acquièrent une certain surface, mais surtout que soit compris par le pouvoir tout le parti que l'on peut tirer de ce type d'image sur le plan de la propagande. En ce domaine, le règne de Louis xiv est exemplaire et c'est à cette époque que les almanachs sont le plus nombreux (plus de 600 pièces connues) et le plus beaux, car les meilleurs artistes de l'estampe y participent souvent (M. Préaud, Les Effets du soleil. Almanachs du règne de Louis XIV, catal. expos. Louvre, 1995). C'est aussi à ce moment que l'actualité prend dans les images une importance considérable, aux dépens des sujets facétieux et légers. La production se maintient tant bien que mal sous le règne de Louis xv (env. 120 pièces connues), puis devient presque inexistante à la fin du xviiie siècle.
Très importante à l'origine, la part typographique se limite dès le règne de Louis xiii au calendrier même, tandis que l'image s'étend, avec des compositions élaborées, un dessin soigné et une gravure de bon niveau, qui participe de la belle qualité atteinte par l'estampe française dans la deuxième moitié du xviie siècle.
Il est alors difficile d'imprimer des cuivres dépassant une cinquantaine de centimètres de côté. Pour publier les grands placards (environ 80 cm × 50 cm) que sont les almanachs, il faut graver deux plaques, les imprimer séparément et rabouter les deux feuilles. Le calendrier est imprimé typographiquement après coup, ou simplement collé, sur un espace blanc réservé par le graveur. Bien que la plupart des épreuves qui nous sont parvenues soient en noir et blanc, beaucoup devaient être vendues coloriées.
La destination de ces images, dont le tirage devait être assez important pour que le prix de vente fût faible, est surtout populaire : les gens qui travaillent ont besoin de savoir si tel jour est ouvrable ou non. On les trouve chez les artisans, les marchands, les gens de justice, dans les cabarets. Exposées sur les cloisons, elles s'abîment avant d'être jetées à la fin de l'année, quand arrive leur remplaçante, ce qui explique leur rareté actuelle.
Les producteurs des almanachs sont de grands éditeurs d'estampes parisiens, comme les Landry, les Moncornet, les Jollain, les Bonnart, les Langlois, ces derniers ambitionnant même de réaliser une histoire en images du règne de Louis xiv. Les artistes, dessinateurs et graveurs, sont souvent restés anonymes, car les almanachs sont généralement le fruit d'un travail collectif d'atelier où l'éditeur assume le premier rôle.
Les almanachs sont des images complexes, comportant une scène[...]
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Écrit par
- Maxime PRÉAUD : archiviste-paléographe, conservateur en chef à la Bibliothèque nationale
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