ALPES
Les Alpes constituent une des principales chaînes de montagne d’Europe, identifiée comme telle dès l’époque romaine, puis clairement circonscrite par les naturalistes à partir du xviiie siècle. Dotées de nombreux sommets dépassant les 4 000 mètres d’altitude, source de plusieurs cours d’eau majeurs du continent, soumises à l’influence de climats très différents, elles sont une composante essentielle de la diversité paysagère et biologique de l’Europe. Placées en position centrale, elles ont profondément frappé, au cours des siècles, l’imagination de ceux, militaires et pèlerins, puis touristes, qui ont été amenés à les traverser. Un temps foyer de constructions politiques majeures en raison de l’importance économique et stratégique des principaux points de passage, elles se sont progressivement retrouvées en marge du territoire de plusieurs grands États européens et des centres importants de développement économique. Depuis les années 1990, les Alpes sont au cœur de constructions institutionnelles variées – traité international, espaces de coopération communautaire, réseaux d’acteurs – qui s’efforcent de mettre en valeur leurs caractéristiques singulières et d’atténuer les contrastes nés du fractionnement géopolitique du continent hérité de l’histoire.
La région alpine
Les Alpes constituent une chaîne de montagnes qui, sauf à ses deux extrémités ligure et dinarique, est clairement différenciée de son environnement fait de vastes plaines (Bavière, plaine du Pô, plaine pannonienne) et de larges couloirs (le Mittelland suisse, la moyenne vallée du Rhône). Mais constitue-t-elle pour autant une région géographique, c’est-à-dire une aire caractérisée par un ensemble de traits communs ou par des relations d’interdépendance entre les parties ? Les réponses à cette question diffèrent fortement selon les critères et les périodes considérés.
Une « civilisation alpine » agro-pastorale ?
À l’aube de la révolution industrielle, l’économie alpine présente de nombreuses similitudes d’un bout à l’autre de la chaîne. On a même pu parler de « civilisation alpine », malgré la diversité des langues parlées et des contextes géopolitiques. La plupart des habitants s’adonnent alors à l’économie agro-sylvo-pastorale, combinant agriculture de subsistance, élevages ovin, caprin et bovin, exploitation du bois et, ici et là, exploitation de gisements métallifères superficiels autorisant, grâce à la production de charbon de bois, un artisanat, voire une petite industrie, du fer. Loin d’être autarcique comme on l’a souvent décrite, cette économie rurale exporte du bois d’œuvre, notamment vers les ports de la mer Méditerranée, des fromages et une partie de sa production artisanale. Elle bénéficie alors des axes de circulation ouverts pour certains depuis l’époque romaine (cols des Grand et Petit-Saint-Bernard et du Mont-Cenis, par exemple), pour d’autres depuis le Moyen Âge (comme le col du Saint-Gothard).
Ces axes ont été fortement améliorés dans la première moitié du xixe siècle, principalement sous l’influence des empires napoléonien et des Habsbourg, notamment pour des raisons politiques et stratégiques. La circulation transalpine a suscité une économie complémentaire, dans les grandes vallées qui pénètrent loin dans la chaîne (Maurienne, Adige, Rhin) ou courent en son milieu (Inn, haut Rhône, Save), dans les petites villes qui les ponctuent et sur quelques cols majeurs (Brenner, Grand Saint-Bernard, Saint-Gothard) profitant de situations de carrefour, mais aussi de la présence de péages, de postes militaires et de postes de douane. Une large partie de la population alpine est concernée par cette ouverture, notamment au travers des migrations saisonnières de travail (par exemple, les colporteurs savoyards et dauphinois) qui amenaient les hommes à fréquenter durant l’hiver,[...]
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Écrit par
- Jean AUBOUIN : membre de l'Institut
- Bernard DEBARBIEUX : professeur à l'université de Genève (Suisse)
- Paul OZENDA : professeur à la faculté des sciences de Grenoble, membre de l'Académie des sciences
- Thomas SCHEURER : docteur ès sciences, géographe
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