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LAMARTINE ALPHONSE DE (1790-1869)

Ni un langoureux, un pleurard (Musset), un « femmelin » (Proudhon), en poésie, ni, en politique, un rêveur égaré hors de son domaine et promis aux fatales bévues de l'innocent, c'est un mâle, au contraire. Lamartine, compromis, certes, en littérature, par un vocabulaire désuet, mais un « voyant », dira Rimbaud ; et, dans les affaires civiques, un de ces très grands qui, les pieds sur terre, savent en même temps regarder loin et apprécier avec exactitude la quantité d'idéal que l'on doit pouvoir, à telle date, insérer dans le réel ; un de ceux qui, « politiques » pour de bon, restent « mystiques ». Composé inusuel, haï des médiocres ; on lui cassera les reins, à ce gêneur !

Lamartine - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Lamartine

Haute figure, Lamartine. Un méconnu, un homme qui n'aura pas cessé de se poser le problème des problèmes : le sens de la vie, le secret du monde. Il a opté, il a parié, quant à lui, dans le noir, résolu à faire comme si Dieu existait, à travailler comme si l'effort humain servait à quelque chose.

Noblesse oblige

Alphonse de Lamartine naît à Mâcon. Il sera l'aîné de six enfants ; pas de frère, rien que des sœurs ; à lui, par conséquent, tous les châteaux et toutes les terres de la famille.

Lorsqu'il a vingt ans (il a fait ses études à Belley, chez les Jésuites déguisés en Pères de la Foi), il souhaiterait entrer dans la diplomatie ou, comme avait fait son père, dans l'armée ; mais l'usurpateur Napoléon est sur le trône, et les Lamartine sont des royalistes intransigeants. Au retour du roi, il est admis dans les gardes du corps, s'abstient, en 1815, de suivre Louis XVIII à Gand, se réfugie en Suisse, puis en Savoie, reprend son service après Waterloo, mais démissionne bientôt et cherche un autre emploi. En 1820, enfin (il va avoir trente ans), il parvient à se glisser dans la carrière, publie ses Méditations et se marie, épousant une Anglaise catholique, Mary-Ann Birch.

Ils auront deux enfants qui mourront l'un et l'autre, le premier (Alphonse) à vingt mois, le second (Julia) à dix ans et demi. Lamartine publie de Nouvelles Méditations (1823), La Mort de Socrate (même année). Le Dernier Chant du pèlerinage d'Harold (1825) ; il a été chargé d'affaires à Florence, mais s'impatiente devant la lenteur de son avancement administratif. Toutefois, il est élu à l'Académie française, en 1829, et publie, en 1830, les deux volumes de ses Harmonies poétiques et religieuses.

La révolution de Juillet lui fournit le prétexte de quitter, par apparente fidélité légitimiste, une carrière qui l'ennuie, et il se présente à la députation, tout en songeant en même temps à un vaste poème, une « épopée de l'âme » dont il a conçu, depuis 1821, le projet. Battu aux élections de 1831, il s'embarque, en juin 1832, pour le Proche-Orient, est élu, en son absence, député de Bergues (près de Dunkerque), grâce aux efforts d'un de ses beaux-frères, regagne la France à l'automne 1833, et prend place à la Chambre, le 23 décembre 1833, pour l'ouverture de la session. Lamartine restera député – de Bergues d'abord, de Mâcon ensuite, et, finalement, du Loiret – jusqu'au coup d'État du 2 décembre 1851. Après avoir publié Jocelyn (1836), La Chute d'un ange (1838), et les Recueillements (1839), il abandonne la poésie et se consacre tout entier à l'action politique. Son Histoire des Girondins (1847) fait partie, dans sa pensée, de cette action.

En 1848, ministre des Affaires étrangères, il est, en fait, le chef du gouvernement provisoire, qui s'est constitué le 24 février. Ses adversaires le feront tomber du pouvoir le 24 juin, et Lamartine, homme politique, s'acharnera à jouer encore un rôle de conseiller au moins jusqu'à ce que Louis Bonaparte, président parjure, égorge la république.

Ses vingt dernières[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé et docteur ès lettres, ancien professeur aux universités du Caire, de Bordeaux, de Lyon et de Genève

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Média

Lamartine - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

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