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ALPHONSE X LE SAGE (1221-1284) roi de Castille et de León (1252-1284)

Roi de Castille, Alphonse X, dit le Sage ou le Savant, a laissé de lui l'image d'un souverain trop affairé à contempler les étoiles pour prêter attention aux choses de ce bas monde ; on l'a ainsi comparé à cet astrologue qui figure dans un exemplum médiéval et qui, trop occupé à tirer les horoscopes des autres, ne voit guère le puits où sa distraction le fera tomber. Victime pourtant plus de son indécision que de sa science, Alphonse X eut un règne semblable à ceux de ses contemporains, connut les mêmes luttes avec ses voisins et les Maures et fut lui aussi trahi par des vassaux tout autres que féaux. Fils de Ferdinand III le Saint et de Béatrice de Souabe, Alphonse naquit à Tolède le 23 novembre 1221. Le premier fait dont on est certain est qu'il combat aux côtés de son père en 1237, à l'âge de seize ans. Ferdinand III meurt en mai 1252, et son fils lui succède à l'âge de trente et un ans. Que la guerre contre les Maures ne soit pas la plus grande préoccupation du jeune monarque n'est pas ce en quoi Alphonse X est le plus digne de blâme. Ses projets d'annexion vis-à-vis des royaumes voisins et la question de l'Empire furent des échecs encore plus graves. Les dernières années d'Alphonse X furent assombries par ses luttes contre son fils Don Sancho le Brave (1281), qui lui succéda contre le droit de ses neveux, fils de l'héritier mort en 1275, et malgré le testament de son père qui le déshérite et meurt à Séville en 1284.

On ne peut pas dire que ce roi ignora les affaires de ce monde ; mais celles-ci ne l'ignorèrent pas non plus, et pesèrent durement sur ses épaules. S'il fut vaillant guerrier et sage législateur, il ne mena à bonne fin aucun de ses projets, ni ne respecta les lois qu'il avait lui-même promulguées. Son défaut capital fut la faiblesse de son caractère, masquée quelquefois par cette obstination opiniâtre qui est l'apanage des faibles. Savant, Alphonse X n'inaugure aucune des disciplines auxquelles il se consacre : mais s'il a des prédécesseurs, il mena bien plus loin qu'eux la systématisation harmonieuse des connaissances humaines. Il est d'autre part, pourrait-on dire, le créateur de la prose castillane, enrichie par des néologismes innombrables (latinismes, arabismes, voire hébraïsmes) et devenue langue officielle de la chancellerie du royaume à la place du latin. Dans la production du savant monarque, les premières places sont réservées aux travaux historiques et judiciaires. L'histoire est représentée par deux importantes compilations, la Primera crónica general et la General Estoria. L'ouvrage fondamental, en matière de droit, est connu sous le nom de Las Siete Partidas, parce qu'il est divisé en sept parties différentes ; l'initiative en fut prise par saint Ferdinand, et son fils la mena à bien en 1256. On doit aussi mentionner des ouvrages d'astronomie, de jeux (échecs, dés, etc.) ainsi que d'autres traités (Lapidario, consacré aux pierres, Setenario sur la vertu du chiffre sept, etc.) qui complètent la production scientifique et didactique du roi savant... Homme de science, le roi Alphonse X était aussi un poète : roi de Castille, il ne poétise guère en langue castillane, mais en galaïco-portugais. On conserve de lui une trentaine de chansons amoureuses ou burlesques ; mais son titre de gloire poétique le plus sûr est constitué par les Cantigas de Nuestra Señora. Cet important recueil de chansons pieuses avec leur musique (environ 430) est en effet le monument le plus important de la poésie et de la musique mariales du Moyen Âge.

— Daniel DEVOTO

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, universités de Buenos Aires et de Paris-Sorbonne, directeur de recherche au C.N.R.S.

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