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ALTERMONDIALISME

Analyse du mouvement altermondialiste

Des mobilisations contre la globalisation

En 1999, l'échec des négociations de l'OMC, qui lui est en partie attribué, insuffle au mouvement de contestation de la globalisation une dynamique d'expansion remarquable. L'année 2000 connaît presque mensuellement un rendez-vous protestataire – à l'occasion de la réunion de Davos, des rencontres internationales du FMI, de la Banque mondiale, des sommets européens ou du G8, ou encore, en France, en témoignage de solidarité lors du procès des militants de la Confédération paysanne accusés du démontage du McDonald's de Millau de l'année précédente. Les coopérations entre associations s'organisent et les réseaux se renforcent avec la tenue du premier Forum social mondial (FSM), à Porto Alegre en janvier 2001, qui se présente alors comme un contre-sommet parallèle au Forum économique mondial de Davos réunissant depuis 1970 les élites économiques et politiques. La forme « forum » essaime ensuite à l'échelle continentale avec l'organisation à Florence, en novembre 2002, du premier Forum social européen, du premier Forum social des Amériques, à Quito en 2004, du premier Forum social africain, à Bamako en 2006, etc. Elle se prolongera avec les forums thématiques (comme le Forum mondial de l’éducation en 2010, celui sur les migrations en 2018, ou encore sur « les économies transformatrices » en 2020). Elle devient le principal lieu d'échanges et de débats mais aussi de socialisation des groupes – syndicats, associations, ONG, groupes de réflexion, réseaux – dont les traditions militantes et modalités d'organisation sont fort diverses et qui apprennent ainsi à se connaître, mais aussi à collaborer pour dégager des principes et lignes d'action communs.

De l'anti- à l'altermondialisation

L'orientation savante de ce militantisme – où le recours à la « contre-expertise » déborde des think tanks et clubs intellectuels stricto sensu – et l'importance en son sein des professions intellectuelles ont conféré au mouvement une forte dimension réflexive portant, notamment, sur son identité et ses perspectives. Comme pour tout mouvement social, la dénomination du mouvement – « altermondialiste » – fut l'enjeu, en son sein et à l'extérieur, de luttes symboliques ayant pour objet le sens à lui donner. Dans le temps pourtant court de son histoire la plus saillante, elle fit, à la charnière du nouveau millénaire, l'objet de discussions et de variations d'un pays et d'un groupe à l'autre.

À la date fondatrice de la protestation contre le sommet de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Seattle en décembre 1999, l'expression « mobilisation contre la mondialisation néolibérale », avec ses déclinaisons nationales (« antimondialisation » en France, « no-global » en Italie par exemple), était la plus usitée : les 1 200 groupes qui s'y rassemblaient avaient trouvé comme dénominateur commun, chacun dans leur spécialité (écologie, humanitaire, droits de l'homme, etc.), la dénonciation des effets humains, sociaux et environnementaux de la mondialisation des flux économiques et financiers. L'expression avait en effet le mérite de rendre compte de la réalité du mouvement dans sa phase d'éclosion : on avait alors affaire à un regroupement hétéroclite de causes le plus souvent anciennes – les associations ayant précisément pour objet de lutter contre cette mondialisation sont minoritaires et de création relativement récente (1998 pour Attac, par exemple) – qui s'associaient le temps d'une mobilisation pour exiger un coup d'arrêt à la libéralisation du commerce et une réforme de l'OMC.

Mais, dès 2001, sont apparues de nouvelles dénominations, comme en Allemagne les « critiques[...]

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Écrit par

  • : syndicaliste, membre de l'association Attac
  • : docteure en science politique, professeure de sociologie politique à l'université Paris-I
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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Média

Forum social mondial de Caracas (2006) - crédits : Andrew Alvar / AFP

Forum social mondial de Caracas (2006)

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