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NIKOLAIS ALWIN (1910-1993)

Une nouvelle conception du spectacle de danse

Après la guerre, il se fixe à New York et devient l'assistant d'Hanya Holm puis, en 1949, son successeur à la tête du Henry Street Playhouse. Là, durant vingt-deux ans, il va présenter ses créations pour la Playhouse Dance Company – rebaptisée, en 1956, Nikolais Dance Company puis, en 1968, Nikolais Dance Theatre. Entouré de jeunes danseurs qu'il a formés, tels Murray Louis, Phyllis Lamhut, Gladys Bailin, il restaure ce lieu et y accueille les enfants du quartier en proposant des cours de percussions, d'improvisation, de jeu scénique et des spectacles populaires humoristiques comme Lobster quadrille (1949), d'après Lewis Carroll.

Rejetant l'expressionnisme dramatique cher à Mary Wigman, il va puiser son inspiration dans l'abstraction en créant en 1956 Kaleïdoscope, un titre emblématique comme celui de Masks, Props and Mobiles (1953), et utilise ingénieusement des accessoires (disques et objets divers) qui lui semblent faire partie intégrante du corps des danseurs. Son travail avec les marionnettes lui a déjà permis de constater l'absence d'expression faciale des poupées dont le pouvoir émotionnel se concentre dans le seul mouvement corporel. Il renonce à différencier hommes et femmes, et conçoit des costumes unisexes pour ses danseurs. Il porte également un intérêt particulier aux éclairages allant par la suite jusqu'à modifier également grâce à eux les proportions et le rythme des corps en mouvement.

Tout en développant une thématique élémentaire fondée sur l'abstraction parfois suggestive du réel, Nikolais bouleverse, à partir des années 1950, les codes traditionnels qui marquent les différents styles de danse et de spectacle chorégraphique. Souvent empreinte d'implications philosophiques, son inspiration procède toujours de la libre association des images en mouvement. En 1966, il déclare : « Je considère cette polygamie du mouvement, de la forme, de la couleur et du son comme un savoir-faire fondamental du théâtre. » Mais il reconnaît : « Pour moi, le mouvement n'élimine pas l'émotion. » Pourtant, en élaborant sa conception de la danse, il demande sans cesse à ses interprètes : « Motion, no emotion ». Il allie étroitement le mouvement corporel, éventuellement métamorphosé par le costume jusqu'à la totale déshumanisation, au jaillissement des couleurs, des sons, des illusions visuelles engendrées par ses complexes projections.

Dans Prism (1956), il effectue ainsi pour la première fois des projections lumineuses sur le corps du danseur, qu'il fragmente ; dans Allegory (1959), il utilise des costumes élastiques et compose un accompagnement musical très sophistiqué à base de synthétiseurs. Durant les années 1960, Nikolais va poursuivre ses recherches dans Totem (1960), Imago (1963) et Vaudeville of the Elements (1963). Dans Somniloquy (1967), il imagine d'orienter la projection sur les danseurs d'un carrousel de diapositives.

Dès 1962, il dirige aussi des stages d'été à Salt Lake City, où il découvre Carolyn Carlson, qui deviendra son interprète emblématique. La télévision et le film expérimental lui ouvrent alors une nouvelle voie.

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Écrit par

  • : docteur d'État ès lettres, conservateur honoraire à la Bibliothèque nationale de France, écrivain et critique

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