AMAZONE, fleuve
Rôle économique
L'Amazone et ses affluents ouvrent, à travers l'impénétrable forêt équatoriale, d'admirables voies de communication. La profondeur et la lenteur des eaux, la pondération de leur débit font de ce réseau le plus navigable du monde. D'une manière paradoxale, l'exploitation en est plus aisée dans la partie intérieure du bassin qu'à l'aval. Les grands affluents du cours inférieur, le Tocantins, le Xingú, le Tapajós, sont barrés par des rapides à une distance relativement faible du confluent, au point où leurs eaux échappent à l'emprise du socle brésilien, ici tout proche du fleuve. Ces obstacles sont beaucoup plus éloignés, vers l'intérieur des terres, sur les affluents du cours moyen, Madeira ou rio Branco, que les navires de fort tonnage peuvent remonter sur 1 000 km. Ils peuvent s'avancer plus avant dans la sylve, au long des artères du cours supérieur, et l'Amazone les accepte jusqu'à Iquitos, au Pérou.
Les petites embarcations indiennes s'aventurent beaucoup plus loin encore, maniées par des navigateurs experts dans l'art d'utiliser les innombrables annexes des grandes artères fluviales. Les furosfont communiquer des cours d'eau différents ; les paranos sont des bras abandonnés par le courant principal, et l'igarapéun affluent modeste, encombré de végétaux, où se glissent les pirogues des chercheurs de latex ou de châtaignes du Brésil. La récolte de ces produits de cueillette est assurée par des métis qui s'enfoncent dans la forêt, par petits groupes, et établissent leurs huttes auprès du dernier igarapé accessible. Leur travail est rythmé par la pulsation des eaux fluviales. Le cueilleur de latex, le seringueiro, n'opère que durant les quatre ou cinq mois de saison sèche, lorsque la varzea, où croissent les arbres à caoutchouc (Heveabrasiliensiset Castilloaelastica), est abordable. C'est, au contraire, durant la saison des pluies que s'affaire le cueilleur de châtaignes. Les eaux de crue lui permettent, en remontant jusqu'aux têtes de source, de gagner les hautes terrasses (terras firmas), où prospère le châtaignier du Brésil (Bertholletia excelsa). La cueillette terminée, les embarcations acheminent vers les centres commerciaux les produits qui gagneront les lieux de consommation par l'intermédiaire de l'Amazone.
Le grand fleuve est tout aussi indispensable à la vie des collectivités d'agriculteurs ou d'éleveurs installées sur les bonnes terres d'alluvions du lit majeur, en aval de Manaus, et surtout dans le pays de Belém et l'île de Marajó. Les petits propriétaires et les fermiers installent leurs champs et leurs pacages à proximité immédiate de l'Amazone, qui leur offre le seul moyen de liaison avec le reste du pays. Il en est de même des quelques plantations qui ont été entreprises à grands frais pour la culture du cacao sur le bas Tocantins, du café sur le rio Negro et de l'hévéa sur le Tapajós.
Le fleuve et ses affluents sont parcourus par des bateaux de tout tonnage, depuis le transatlantique qui remonte le fleuve sur la moitié de son cours et parvient à Manaus, jusqu'à la pirogue indigène, en passant par la foule des embarcations de moyen tonnage utilisées pour le transport des voyageurs et de marchandises. La plupart sont de véritables boutiques flottantes que leurs propriétaires juifs, syriens ou portugais utilisent à toutes sortes de trafics. Le rôle joué par la navigation fluviale dans la vie économique régionale est tel que la carte de répartition de la population se calque sur celle du réseau hydrographique : il n'est pas d'établissement humain fixe notable à distance d'une artère navigable. Les deux seules grandes villes, Manaus et Belém, héritières de postes militaires installés par les Portugais au xviie siècle, doivent leur[...]
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Écrit par
- Pierre CARRIÈRE : agrégé de géographie, docteur d'État ès lettres
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