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ÂME

La notion d'âme, de la Renaissance à l'époque contemporaine

La Renaissance

Marsile Ficin, à côté d'une âme rationnelle et libre, ne renonce pas à l'« âme des astres », en somme à une conception psychocosmique. Paracelse évoque un corps astral des âmes et entre les âmes, Patrizi une pampsychia, Giordano Bruno une âme universelle. Chez Cornelius Agrippa, l'intellect, c'est l'âme du monde : il est vrai qu'Agrippa se livre à la hiérarchisation décroissante pur intellect-raison-âme sensitive. Ailleurs, il platonise avec une âme substance divine dans les corps. Ici donc on trouve deux sortes d'âme : l'une d'essence spirituelle, l'autre plus proche de la vie, sinon de la matière. Pour Nifo, l'âme correspond à une activité psychique spiritualisante. Pomponazzi parle d'une âme intellective qui se distingue par sa poly-influence sur le corps : il s'agit d'une psychophysiologie à tous les niveaux. Si Fracastori consent à poser l'individualité d'une âme « séparée et abstraite du corps », c'est qu'il se place au regard de Dieu, ce qui ne l'empêche pas, selon La Forge (1666), d'en venir presque à la corporéifier, en l'assimilant « aux choses qu'elle se représente ». Guillaume Postel s'adonne à une analyse fouillée de la notion, distinguant l'anime, intellect agent, de l'« âme », intellect patient. La première est une âme intellective impérissable unie à l'âme proprement dite, produit naturel du sang. Elle est mue par la mente, elle-même lumière pour les théologiens, âme dirigée par l'esprit selon les philosophes.

Le XVIIe siècle

Gassendi n'est pas loin de ces opinions ; il pense – peut-être, car l'interprétation de sa philosophie appelle nuances et prudence – à une forme animant l'esprit et le corps. Cependant, où se situerait exactement ce et ? En tout cas, Descartes, lui, sépare nettement les deux, l'union âme-corps posant problème. C'est précisément cette union que s'efforceront, sinon d'éclaircir complètement, du moins d'étudier avec passion et rigueur, les cartésiens. À ce titre, citons d'abord La Forge, qui analyse les opérations tant de l'esprit, « faculté » de l'âme, que du cerveau, corporel, sans omettre le cas des états ou des notions plus ou moins intermédiaires. Cordemoy travaille sur le même thème : « de l'union de l'Esprit et du corps... de la distinction du corps et de l'âme », mais son originalité apparaît principalement dans un Discours physique de la parole, où, en matière de signe, il tâche de donner à l'âme (esprit, pensée) son rôle le plus objectif. C'est toujours l'« union » qui préoccupe Rohault, Cally, Regis... et Malebranche. Celui-ci, attaché à une nature spirituelle, garde à l'âme sa généralité, qui renvoie à des corrélats tels que conscience, connaissance, sentiment intérieur ; et il emploie plutôt « esprit » dans une acception plus fonctionnelle. Cependant, il ne s'acharne pas à établir de systématiques distinguos. Francis Bacon, se référant au « souffle » de la Genèse, aboutit à la distinction entre l'âme rationnelle, venant de Dieu, et l'âme engendrée, commune aux hommes et aux animaux. Hobbes interprétera ledit souffle dans le sens d'une dominante matérielle. Spinoza semblerait ne pas attacher trop d'importance au principe et à la finalité de la notion d'âme. Il considère bien comme distinctes l'âme et l'idée de l'âme, mais il les voit unies en tant qu'unique attribut de la pensée ou, plus profondément, comme étant soit essence attribut de Dieu, soit engagement dans l'« ordre commun de la nature », cette alternative se résolvant, si l'on peut dire, dans le [...]

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