AMÉRIQUE (Histoire) Amérique portugaise
Le cycle de l'or
La poussée minière
Considérons le tableau de la production aurifère du Brésil au xviiie et au début du xixe siècle. Nous constatons une poussée jusque vers 1760. Les chercheurs d'or viennent de São Paulo mais aussi de la côte. Ils achètent des esclaves à prix élevé pour le travail des mines, provoquant une pénurie de main-d'œuvre et son renchérissement dans les plantations de canne de la côte. Ces esclaves s'installent près du lit des rivières ou dans leur lit même. Ils creusent un puits carré, la cata, jusqu'au cascalho, c'est-à-dire la couche de gravier où l'or a des chances de se trouver. Ils concassent le gravier et le passent au tamis qui ne conserve que les grains d'or. Au cours des ans, ces procédés se sont améliorés. On a construit des canaux qui amènent l'eau à flanc de montagne où peuvent se trouver les filons. Le gouvernement portugais perçoit un impôt, le quinto (le cinquième), sur la production, du moins au début. Car, en 1735, le quinto est remplacé par une capitation. Chaque « mineur » paie 17 grammes d'or par esclave. En 1750, Pombal revient au système du quinto mais en maintenant, pour l'ensemble du Minas, le minimum de 100 arrobes (1 arrobe = 12 kg). Tandis que l'extraction de l'or se poursuivait autour de Vila Rica, de Sabarà (célèbres encore aujourd'hui pour leurs églises baroques) et de Congonhas Bo Campo où sculpta le génial Alejadinho, alors que des gisements étaient exploités dans le Matto Grosso, le Goyaz et même près de Jacobinas (dans la capitainerie de Bahia), on découvrait, en 1729, dans le Cerro Frio, au nord de Vila Rica, des gisements de diamant. Bientôt, naissait une nouvelle ville : Diamantina. La production fut telle que la valeur du diamant baissa de 75 p. 100 sur le marché international.
Cette intense activité minière a, dès 1760, d'importantes conséquences :
– géographiques d'abord. Un système de routes muletières se crée autour de Vila Rica, pour le ravitaillement du Minas en hommes et en marchandises : route de São Paulo, et, au-delà du Rio Grande, routes de Rio et de Bahia.
– démographiques. Le Minas vide de sa population le reste du Brésil : Blancs et métis de São Paulo, de Rio, de Bahia et, par là, du Portugal (Emboabas) ; Noirs pris sur les plantations ou sur les contingents fraîchement arrivés d'Afrique. De ceux-ci, le Brésil en avait importé 500 000 entre 1570 et 1750. Trois millions y entrent encore entre 1750 et 1850, soit 30 000 par an. La capitainerie de Minas atteint 320 000 habitants en 1776.
– économiques. Il se crée, dans le Minas, une nouvelle économie « esclavocrate », avec des caractères qui la distinguent de la vieille économie esclavocrate sucrière. D'une part, elle nécessite moins de capitaux au départ et donne plus rapidement de gros profits, alors que, dans l'économie sucrière, la rentabilité des investissements était faible ou nulle. Elle est ouverte à une masse plus grande d'immigrants. Elle est donc plus « démocratique ». D'autre part, pour ces mêmes raisons, elle représente un nouveau marché de consommation, beaucoup plus large que les précédents. Le produit obtenu, l'or, augmente considérablement la circulation monétaire. D'une économie à demi fermée on passe à une économie d'échange et à une économie de masse. Les vieux marchés de la côte en sont ranimés et développés : ils deviennent des marchés de ravitaillement pour le Minas. Sur place même, la présence de la société minière stimule l'agriculture et l'élevage.
Le déclin minier
Vers 1760, la production de l'or baisse. À partir de 1770, la baisse est encore plus rapide. Les mines s'épuisent. Seul le diamant continue à arriver en quantités importantes sur les marchés internationaux. D'une économie minière dominante, le Brésil[...]
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Écrit par
- Frédéric MAURO : professeur d'histoire à l'université de Nanterre et à l'Institut des hautes études de l'Amérique latine
Classification
Médias
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