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AMIANTE ou ASBESTE

Aspects juridiques

— Henri PÉZERAT

Après les Pays-Bas (1978 et 1993), le Danemark (1980), la Suède (1982), l'Italie (1993), l'Autriche, la Finlande et l'Allemagne (1994), la France a été le huitième pays européen à interdire l'usage de l'amiante. Le 3 juillet 1996, le ministre français du Travail et des Affaires sociales, Jacques Barrot, annonçait l'interdiction définitive du minéral sur le territoire du pays. L'annonce a fait grand bruit. Elle est intervenue au lendemain de la diffusion d'une expertise de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (I.N.S.E.R.M.) qui chiffrait à 1 950 le nombre de décès attribuables à l'amiante en France en 1996. Ainsi venait à terme un long parcours de prise de conscience du drame sanitaire en cours par des pouvoirs publics que le rapport de la mission d'information du Sénat (2005) n'hésite pas à décrire comme « anesthésiés » par le lobby de l'amiante. Le fait est que, après la découverte, en 1975, par les chercheurs du campus de Jussieu (Paris), que leurs locaux recèlaient d'importantes quantités d'amiante, le décret de 1977 réglementant le niveau d'exposition des salariés sur leur lieu de travail a couvert, jusqu'au milieu des années 1990, une période de faible mobilisation ; il fut en outre mal appliqué.

La mesure d'interdiction prise par le gouvernement français est intervenue dans un contexte juridique tendu. Certains ont même soupçonné les pouvoirs publics, traumatisés par l'affaire du sang contaminé, d'avoir voulu couper court à la recherche des responsabilités dans un nouveau dossier touchant la santé publique. Vingt ans après les premières actions, aux États-Unis (1973), de premières plaintes pour homicide involontaire avaient été déposées en juin 1994 par les veuves de six enseignants d'un lycée professionnel de Gérardmer (Vosges), qui tous avaient travaillé dans un atelier dont le plafond était floqué à l'amiante. Les procédures isolées se sont ensuite succédé jusqu'à la création, en février 1996, d'une Association nationale de défense des victimes de l'amiante (Andeva).

Le 25 juin 1996, l'Andeva a placé sous les projecteurs le « scandale » de l'amiante en déposant une plainte contre X au parquet de Paris pour empoisonnement, voie de fait ayant entraîné la mort, homicide involontaire, coups et blessures involontaires, abstention délictueuse. Les industriels du secteur, mais aussi les experts du Comité permanent amiante et les pouvoirs publics, accusés d'avoir minimisé les risques pendant des années, étaient particulièrement visés.

Une première condamnation fut prononcée en 1997 contre la société Eternit, ancienne exploitante, jusqu'en 1965, des gisements amiantifères de Canari, au cap Corse. Depuis lors, à la suite de décisions de la Cour de Cassation (2002) reconnaissant la « faute inexcusable de l'employeur » dans les cas de maladie professionnelle, de nombreuses procédures civiles ont été engagées devant les tribunaux.

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Écrit par

  • : chef de section médecine-modes de vie, service société au journal Le Monde
  • : directeur de recherche honoraire au C.N.R.S., toxicologue
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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