AMOUR
Les représentations de l'amour dans l'art occidental
Les représentations de l'Amour sont innombrables dans l'art occidental depuis la Renaissance. Elles se présentent sous des formes variées. Cupidon, réputé être le fils de Vénus, est à la fois l'agent et l'incarnation du pouvoir que la déesse exerce sur les hommes. Cette figure n'est donc pas sans ambiguïté : c'est à la fois un être déterminé, avec son origine et son histoire, et la personnification d'une notion abstraite et intemporelle. Par certains côtés, l'Amour est un dieu, et par d'autres une allégorie.
Il est arrivé aux écrivains et aux artistes, suivant la tradition de l'Antiquité, de multiplier les figures de l'Amour : le petit dieu apparaît au milieu de nombreux frères, et l'Amour finit par se confondre dans la multitude anonyme des Amours. Ces gracieuses créatures n'ont pas tardé à envahir l'art chrétien : à côté des anges et des archanges, que la tradition du Moyen Âge représente comme de jeunes hommes ailés d'une beauté surnaturelle, apparaissent des angelots, leurs jeunes frères, représentés comme de petits enfants.
L'amour profane
Il n'y a pas de mot en français pour désigner ces légères créatures, et l'on se sert de l'italien putto. Au sens propre, le putto est un enfant de quatre ou cinq ans. Dans le langage des artistes, les putti sont ces petits êtres dont les formes rondes et les mines rieuses fournissent mille ressources à l'imagination. Les enfants représentés en tant que tels sont rares avant le xviiie siècle. C'est dans les assemblées d'Amours et d'angelots que l'on voit s'exprimer l'intérêt que les peintres et les sculpteurs ont porté à l'enfance. Lorsque, avec les Lumières, l'enfant prend sa place dans la société, le putto perd son importance comme motif artistique. La première moitié du xixe siècle a vu disparaître entièrement ce thème.
Les traités et les manuels de mythologie font toujours de l'Amour le fils de Vénus. Sur l'identité du père, il y a des hésitations. Le plus souvent Cupidon a pour père Mars, mais parfois c'est Mercure, et parfois il n'a pas de père du tout. Dans tous les cas la naissance de l'Amour est un sujet extrêmement rare. Enfant perpétuel, il semble exister de toute éternité.
Discrets sur la naissance de l'Amour, les poètes et les artistes sont en revanche prodigues de détails sur son éducation. C'était un gamin insupportable qu'il n'a jamais été possible de bien élever. L'essentiel de cette tâche est revenu à la mère, et en particulier les punitions. Deux groupes en bronze de Francesco Susini montrent Vénus fouettant l'Amour et Vénus brûlant les flèches de l'Amour (1639 ; une paire est conservée au Louvre). Ces sujets, inspirés d'Anacréon et de ses imitateurs alexandrins, ont eu une grande fortune au xviiie siècle. Deux statuettes en marbre de Falconet représentent en pendants Vénus qui allaite l'Amour et Vénus fouettant l'Amour (1760 ; plusieurs exemplaires sont connus, dont une paire dans la collection Frick, à New York, et une autre dans la collection Wallace, à Londres).
Les méfaits de l'Amour n'ayant épargné personne, nombreux sont les dieux qui eurent à le punir. Un tableau quelquefois attribué à Caravage et quelquefois à Bartolommeo Manfredi montre l'Amour renversé à terre et sévèrement fouetté par Mars (Art Institute, Chicago). Vénus essaie de calmer la fureur du dieu de la Guerre ; Mars est un fort gaillard qui, ayant retroussé ses manches, retient d'une main ferme un Amour déjà grand, jeune garçon plutôt qu'enfant, avec des cheveux frisés et une mine de voyou. Nous sommes ici loin des gentillesses alexandrines. Ce genre de sujets est d'ailleurs rare dans le milieu des peintres[...]
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Écrit par
- Georges BRUNEL : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de lettres, conservateur des objets d'art des églises de la Ville de Paris
- Baldine SAINT GIRONS : maître de conférences en philosophie à l'université de Paris-X-Nanterre
Classification
Médias
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