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HARMONIQUE ANALYSE

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La transformation de Fourier

Certaines classes importantes de fonctions ne se prêtent pas à l'analyse harmonique telle qu'elle a été définie ci-dessus. Ainsi, l'espace L1(R) des (classes de) fonctions intégrables sur R ne contient aucune exponentielle ; aussi utilise-t-on un autre procédé pour en faire l'analyse et la synthèse. C'est la transformation de Fourier qui permet de définir le spectre d'une fonction intégrable et, dans certains cas, d'en faire la synthèse.

Soit f une fonction intégrable (par exemple, continue et nulle hors d'un ensemble borné). À f on associe une autre fonction définie sur R, notée ou Ff, et appelée transformée de Fourier de f :

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La présence du coefficient − 2π est conventionnelle (la convention n'est d'ailleurs pas universelle) et permet d'avoir une formule de réciprocité particulièrement simple.

Définissons, outre l'opérateur F de transformation de Fourier, l'opérateur F− de transformation de Fourier conjuguée (ou réciproque) :

Pour toute fonction f, et tout réel t, on a :

Propriétés de la transformation de Fourier

a) Pour toute fonction intégrable f, Ff est continue et tend vers 0 à l'infini. Si on désigne par A(R) l'ensemble des fonctions Ff, pour f ∈ L1(R), A(R) est donc un sous-espace de l'espace vectoriel C0(R) des fonctions continues sur R qui tendent vers 0 à l'infini. En fait, A(R) est strictement plus petit que C0(R). b) Si f et g sont intégrables, leur produit de convolution f*g, défini par :

l'est également. On a alors la relation :
de sorte que A(R) est un anneau de fonctions continues sur R, de même que L1(R) est un anneau pour la convolution. Cette circonstance permet d'appliquer à l'étude de A(R) et de L1(R) la théorie des algèbres normées (cf. algèbres normées), qui en est d'ailleurs issue en grande partie. c) Si y et u sont des réels, ϕ une fonction, on définit les fonctions ϕy, ϕu, ϕ−, ̌ϕ, ̃ϕ par :

On a alors :

d) Si f est dérivable et si f et f ′ sont intégrables, on a :
e) Si f est intégrable, ainsi que son produit par x, alors Ff est dérivable et on a :

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Il est intéressant de voir comment certaines propriétés des fonctions se traduisent sur leurs transformées de Fourier.

Par exemple, les relations (8) et (9) montrent que plus une fonction est régulière (dérivable), plus sa transformée de Fourier tend rapidement vers 0 à l'infini. Inversement, plus f tend rapidement vers 0 à l'infini, plus Ff est régulière. Voici un autre exemple, présenté en termes vagues : plus les valeurs d'une fonction sont concentrées autour de l'origine, plus celles de sa transformée de Fourier sont, au contraire, étalées.

Le théorème de réciprocité

De même que la série de Fourier d'une fonction périodique caractérise celle-ci, sans qu'aucune propriété de convergence soit nécessaire, la transformée de Fourier d'une fonction f caractérise cette fonction. Donc la donnée de Ff contient toute l'information relative à f. Dans certains cas, il est possible d'exprimer f explicitement à partir de Ff.

Théorème. Si f et Ff sont toutes deux intégrables, on a :

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C'est là une remarquable propriété de symétrie entre les opérateurs F et F−.

On peut encore interpréter cela comme une propriété de synthèse : si on appelle spectre de f le support de sa transformée de Fourier Ff, c'est-à-dire l'adhérence de l'ensemble des points où Ff ne s'annule pas, le théorème de réciprocité, lorsque Ff est intégrable, s'écrit :

et exprime que f est, en un certain sens, synthétisable, puisque f (x) s'exprime sous la forme d'une intégrale (donc comme limite de combinaisons linéaires) à partir des exponentielles qui correspondent à des valeurs t contenues dans son spectre.

Une classe très importante de fonctions se prête à l'utilisation du théorème de réciprocité : c'est la classe S des fonctions indéfiniment dérivables à décroissance rapide. Une fonction f appartient à S si, et seulement si, elle admet des dérivées de tous les ordres et si, quels que soient les entiers n et p :

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Les relations (8) et (9) montrent que si f appartient à S, il en est de même pour Ff, et réciproquement. De sorte que F est un isomorphisme linéaire de S sur S, dont F− est l'isomorphisme réciproque. En fait, si on considère la topologie usuelle de S (cf. distributions), F et F− sont des isomorphismes continus.

Extension aux distributions tempérées

Rappelons brièvement (cf. distributions) que, si l'on désigne par S′ l'espace des distributions tempérées, espace dual de S, la transformation de Fourier sur S permet de définir, par transposition, la notion de transformation de Fourier sur S′ qui fournit un isomorphisme de S′ sur S′. Cela donne d'intéressantes applications, par exemple, à l'étude d'équations différentielles, ou plus généralement d'équations de convolution (lorsque l'on étend cette théorie aux espaces Rn de dimension supérieure à 1, on peut traiter par ce procédé des équations aux dérivées partielles linéaires à coefficients constants). D'après la propriété b, une telle équation est transformée par Fourier en une équation qui pourra, dans certains cas, se résoudre par division. Par exemple, un opérateur différentiel linéaire à coefficients constants (convolution par une combinaison linéaire de dérivées de la mesure de Dirac en 0) devient, par transformation de Fourier, l'opérateur de multiplication par un polynôme.

Ces idées sont à rapprocher de la transformation de Laplace.

Transformation de Fourier-Plancherel dans L2 (R)

Les espaces L1(R) et L2(R) ne sont pas inclus l'un dans l'autre. Mais ils contiennent tous deux l'ensemble K(R) des fonctions continues nulles hors d'un ensemble borné, et tout élément de L1(R) ou de L2(R) peut être approché, au sens de L1 ou de L2 selon le cas, par des éléments de K(R).

Si f appartient à K(R), Ff appartient à L2(R), et on a l'égalité :

formellement analogue à (4).

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Cette relation permet d'étendre à L2(R) la transformation de Fourier (aussi bien que la transformation de Fourier réciproque) : on obtient ainsi un opérateur, toujours noté F, de L2(R) dans L2(R) qui coïncide avec la notion précédente de transformation pour les fonctions qui, comme celles de K(R), appartiennent à la fois à L1(R) et à L2(R).

Pour f dans L2(R), on écrit aussi parfois :

bien que cette formule n'ait pas de sens pour deux raisons : d'abord, l'intégrale peut ne pas être convergente ; ensuite Ff est un élément de L2(R), donc défini à un ensemble de mesure nulle près, et on ne peut pas considérer la valeur d'un tel objet en un point particulier.

Ce nouvel opérateur de L2(R) dans L2(R), appelé transformation de Fourier-Plancherel, est un isomorphisme isométrique de L2(R), dont l'isomorphisme réciproque est F− (plus exactement, l'extension de F− à L2).

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Pour f et g dans L2(R), on a l'identité de Parseval, qui exprime précisément l'isomorphisme de l'espace de Hilbert L2(R) dans lui-même défini par F :

Cela permet, comme pour les séries trigonométriques, d'exploiter, dans l'analyse harmonique des fonctions de carré intégrable, la puissance de la théorie des espaces de Hilbert.

Généralisations

La transformation de Fourier que nous avons introduite pour les fonctions d'une variable réelle se généralise sans peine aux fonctions de plusieurs variables réelles.

Soit f une fonction intégrable sur Rn (n entier ≥ 1). On définit la transformée de Fourier de f comme la fonction de n variables définie sur Rn par :

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Les propriétés sont, en dimension n, tout à fait analogues à celles que l'on a en dimension 1.

Une autre direction de généralisation consiste à définir la transformée de Fourier de f non seulement pour des valeurs réelles de t, mais aussi pour certaines valeurs complexes. On pose :

fonction définie pour certaines valeurs de z. Lorsque f est, par exemple, nulle pour les valeurs négatives de x, on retrouve la notion de transformée de Laplace.

Lorsque Ff (z) peut être définie pour toute valeur de z, on peut déduire du comportement de la fonction de variable complexe obtenue de nombreux renseignements sur la fonction f donnée (théorème de Paley-Wiener, par exemple).

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