HARMONIQUE ANALYSE
Les groupes commutatifs localement compacts
La mesure de Haar
La démonstration par Haar, en 1933, de l'existence d'une mesure invariante par translation, sur une large classe de groupes topologiques, permet, à partir de cette époque, de situer l'analyse harmonique dans sa vraie perspective et d'en comprendre la nature profonde.
Si on considère, sur R, la mesure de Lebesgue dx, on constate qu'elle est invariante par translation, en ce sens que, pour toute fonction intégrable f et tout réel t, la translatée ft est intégrable et a même intégrale que f. De même, sur le groupe multiplicatif des nombres complexes de module 1, que l'on peut, en ce qui concerne la théorie de la mesure, identifier à l'intervalle [0, 2π], la mesure de Lebesgue est invariante par translation, car, pour toute fonction intégrable f, et tout λ de module 1, on a :
Parmi les groupes topologiques, ceux qui sont localement compacts (cette classe contient, entre autres, les groupes de Lie) possèdent une propriété analogue.
Pour une fonction f définie sur un groupe G, et un élément t du groupe, on considère les translatées tf et ft de f par t, respectivement à gauche et à droite, données par :
(le groupe est noté multiplicativement). Il y a lieu de distinguer les translations à gauche et à droite si G n'est pas commutatif. Lorsque G possède la propriété de compacité locale, le théorème de Haar affirme l'existence (et l'unicité à un facteur multiplicatif près) d'une mesure invariante par les translations à gauche, c'est-à-dire telle que, pour tout t ∈ G et toute fonction intégrable f, tf soit intégrable et de même intégrale que f. Il y a également une mesure invariante par les translations à droite, mais elle diffère en général de la mesure invariante à gauche (pour les groupes compacts, ces deux types de mesures sont identiques, de même que pour les groupes commutatifs). Une telle mesure est appelée mesure de Haar à gauche (ou à droite, selon le cas). Si μ est une mesure de Haar à gauche, f une fonction μ-intégrable et t un élément de G, on a donc :Le théorème de Haar et l'étude des représentations linéaires des groupes topologiques forment le cadre de l'analyse harmonique abstraite.
Nous allons donner un bref aperçu de cette théorie dans le cadre des groupes commutatifs localement compacts, où elle est beaucoup plus simple et plus développée.
Le théorème de dualité de Pontriaguine et Van Kampen
Soit G un groupe commutatif localement compact ; l'opération de G est notée additivement, 0 désigne l'élément neutre.
On appelle caractère de G tout homomorphisme continu de G dans le groupe multiplicatif des nombres complexes de module 1. Autrement dit, un caractère est une fonction continue γ sur G, telle que, quels que soient x et y dans G :
on en déduit, évidemment :Si γ et γ′ sont deux caractères, la fonction qui, à tout x de G, associe γ(x)γ′(x) est encore un caractère que l'on note γ + γ′. Il est facile de voir que l'on peut ainsi munir l'ensemble des caractères sur G d'une structure de groupe commutatif, que l'on rend localement compact en y considérant une topologie particulière (c'est la topologie de la convergence uniforme sur les parties compactes de G).
Notons G le groupe commutatif localement compact formé des caractères de G. Ce groupe est appelé dual de G. On peut considérer le dual de G, qui est un groupe commutatif localement compact G.
Pour tout x de G, la fonction définie sur G par γ → γ(x) est un caractère sur G, donc un élément de G. On a ainsi une application de G dans G.
Le résultat fondamental établi, vers 1935, par Pontriaguine et Van Kampen est le suivant : L'application de G dans G définie ci-dessus est un isomorphisme topologique. En d'autres termes, le dual du dual d'un groupe G s'identifie à G[...]
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Écrit par
- René SPECTOR : professeur à l'université d'Orléans
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