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ANAMORPHOSES OU THAUMATURGUS OPTICUS LES PERSPECTIVES DÉPRAVÉES, Jurgis Baltrušaitis Fiche de lecture

« Folier par raison »

Le livre s'ouvre par une citation de Corneille Agrippa : « Il n'y a rien de plus périlleux que de folier par raison » (dans De incertitudine et vanitate scientiarum et artium atque excellentia verbi Dei declamatio, Anvers, 1530). À travers l'exemple de l'anamorphose, l'historien de l'art nous montre l'existence et la permanence d'implications aberrantes, fantastiques et même magiques au sein du savoir occidental le plus rationnel. Cette réflexion, qui forme en quelque sorte le cœur de l'ouvrage, s'étend sur cinq chapitres. C'est dans le couvent parisien des Minimes que le père Jean-François Niceron, qui était peintre, se consacra à des recherches sur la perspective et ses dérèglements ; dans son Thaumaturgus opticus (1646) il systématisa la tradition géométrique et occulte de l'illusion optique, en donnant à l'anamorphose le statut de science. Le couvent des Minimes, et ses mathématiciens, était étroitement lié à Descartes, lequel se réfère aux automates et aux prodiges de la perception pour préciser sa théorie des erreurs visuelles et pour affirmer la nécessité du doute dans le processus de la connaissance. L'anamorphose prend donc les dimensions d'une métaphore intellectuelle et religieuse. Dans les fresques du couvent de la Trinité-des-Monts à Rome et du cloître des Minimes, Niceron et le père Emmanuel Maignan, peintre lui aussi, donnèrent les premiers exemples d'anamorphoses à grande échelle dans leurs représentations de saints peints selon une perspective déformée. En exposant ainsi des œuvres qui instillent le doute dans l'esprit du spectateur, les Minimes rappelaient la vanité des apparences et la nécessité pour l'homme de recourir à la vérité théologique.

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Écrit par

  • : chargée de recherche à l'Institut national d'histoire de l'art, Paris

Classification

Autres références

  • ILLUSION THÉÂTRALE

    • Écrit par
    • 940 mots

    L'illusion désigne généralement une fiction que l'on tient pour vraie. Elle possède un sens optique, moral et métaphysique – trois sens d'ailleurs conjoints dès Platon. Celui-ci distingue en effet le monde des apparences sensibles et celui des Idées, c'est-à-dire le réel perceptible...