VIERU ANATOL (1926-1998)
Avec Tiberiu Olah, Pascal Bentoiu et Ştefan Niculescu, Anatol Vieru est l'un des principaux compositeurs roumains de la génération intermédiaire, celle qui a été formée par les disciples d'Enesco et qui a eu la rude tâche de se définir une identité dans le contexte de la Roumanie communiste.
Originaire de Moldavie, il naît à Iaşi le 8 juin 1926. Il fait des études de philosophie à Bucarest tout en poursuivant ses études musicales au conservatoire de Bucarest, où il travaille l'harmonie avec Paul Constantinescu, l'orchestration avec Theodor Rogalski, la direction d'orchestre avec Constantin Silvestri et la composition avec Leon Klepper (1946-1951). Parallèlement, il commence une carrière de chef d'orchestre à l'Opéra de Bucarest (1947-1950). Titulaire du prix d'État (1949), il est rédacteur en chef du magazine Muzica (1950-1951), puis passe trois ans à Moscou, où il est l'élève d'Aram Khatchatourian au conservatoire Tchaïkovski (1951-1954). À son retour en Roumanie, il commence à enseigner au conservatoire de Bucarest, où il est professeur d'orchestration et de composition entre 1964 et 1986.
Après une série d'œuvres à mi-chemin entre l'expressionnisme et le folklorisme (Suite en style ancien pour cordes, 1945 ; Danses symphoniques, 1952), il pratique une écriture résolument nouvelle, dans laquelle le langage sériel occupe une place prépondérante, à côté d'une modalité originale : Miori Üa (La Brebis), oratorio (1957), Quatuor à cordes no 1 (1955), Concerto pour orchestre (1955). Mais sa musique reste en relation étroite avec les sources traditionnelles roumaines. En 1962, son Concerto pour violoncelle lui vaut le premier prix au concours international de composition Reine-Marie-José, à Genève. Vieru y montre un intérêt nouveau pour l'impressionnisme, qui se manifeste à nouveau dans Jocuri (Jeux) pour piano et orchestre (1963).
En 1967, il suit les cours de musique nouvelle à Darmstadt. Il s'engage alors dans une voie encore plus novatrice, où l'aléatoire occupe une place importante, mais sans faire abstraction des expériences précédentes. Le Crible d'Ératosthène pour clarinette, violon, alto, violoncelle et piano (1969) est une partition qui joue sur la périodicité d'événements musicaux représentant les nombres premiers. Parallèlement, Vieru élabore une écriture qui procède de grands blocs sonores (pouvant atteindre soixante et un sons). Son premier opéra, Iona (Jonas, 1972-1976) est une synthèse de ces différentes tendances, que l'on retrouve dans Clepsydre I pour orchestre (1968, créée à Donaueschingen en 1969), Clepsydre II pour chœur, flûte de Pan, cymbalum et orchestre (1971), dans la Symphonie no 2 (1973) et dans le Concerto pour clarinette (1975). Ses œuvres commencent à être connues hors de Roumanie : Elisabeth Chojnacka et Marius Constant créent Museum Music à Paris en 1970 ; Bruno Maderna dirige la première audition d'Écran à Royan en 1971 ; un concert de ses œuvres est donné à Berlin-Ouest en 1975 ; Lucas Vis crée Iossif et ses frères au festival de Metz en 1979 ; Oleg Kagan et Natalia Gutman jouent le Concerto pour violon, violoncelle et orchestre en 1980. En 1978, il reçoit le titre de docteur ès musicologie pour un ouvrage théorique important, Des modes, vers un modèle de la pensée musicale intervallique (Bucarest, 1980). Son œuvre s'enrichit : sept quatuors à cordes (1955-1991), cinq symphonies (dont la troisième est écrite après le tremblement de terre de Bucarest de 1976), deux nouveaux opéras (La Fête des camelots, 1978-1981 ; Télégrammes, thème et variations, 1982-1983) et de nombreuses œuvres pour chœur. Il est invité à donner des cours à la Juilliard School of Music de New York, à l'académie Rubin de Jérusalem, à Darmstadt. En 1992-1993, il est compositeur en résidence à l'université[...]
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Écrit par
- Alain PÂRIS : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France
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