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JAKOVSKY ANATOLE (1907-1983)

Né en 1907 à Kichineff (Roumanie), le critique d'art Anatole Jakovsky meurt à Paris le 24 septembre 1983. Son nom reste attaché au destin de l'art naïf et, en ce sens, le couronnement de sa carrière aura été l'ouverture à Nice, en 1982, du Musée international d'art naïf Anatole Jakovsky, constitué à partir de ses propres collections.

Avant de se vouer corps et âme à la défense des peintres autodidactes, il avait milité en faveur de l'avant-garde la moins contestable. Arrivé à Paris en 1932, il rédige dès l'année suivante la première monographie du peintre Auguste Herbin. En 1937, il consacre un ouvrage regroupant six essais à ses amis Arp, Calder, Hélion, Miró, Pevsner et Seligmann, choix fortement marqué par un sens aigu de la modernité. On lui doit également Clefs des pavés (1939), un recueil de poèmes illustré par des plaques de Rhodoïd fluorescents de Robert Delaunay. Mais les difficultés qu'il devait connaître dès le début de la Seconde Guerre mondiale, en l'amenant à tirer du « marché aux puces » le plus clair de ses ressources, vont le rendre plus particulièrement sensible à ces « peintures idiotes » naguère célébrées par Rimbaud. Dès 1949, il publie son premier ouvrage sur l'art naïf, engageant ainsi un combat que l'on peut estimer victorieux dès 1958, date à laquelle il préside le jury de l'exposition d'art naïf de l'Exposition internationale de Bruxelles.

Oubliant apparemment ce qu'il avait adoré avant 1940, Jakovsky dénonça « l'impérialisme abstrait » et tout ce qui, dans l'art de ces dernières décennies, « confondait le beau et le laid, l'authentique et le sophistiqué, le créé et les effets du hasard, l'inspiré et le fabriqué de toutes pièces ». D'une façon plus discutable encore, il pourfendit l'art brut – « où, disait-il, le mot « art » est le plus souvent de trop », reprenant ainsi contre les artistes défendus par Dubuffet les arguments utilisés auparavant contre les naïfs. Il se confondait à ce point avec la cause de la naïveté qu'il en venait à mettre en doute la qualification de ses précurseurs – comme Wilhelm Uhde – ou de ses pairs – comme Otto Bihalji-Merin. On lui reprochera plus justement d'avoir, dans ses dernières années, mêlé à ces manifestations parfois intempestives d'une rigueur sans relâche des faiblesses pour l'œuvre un peu trop « charmante » de certaines dames comme Alexandrine ou Micheline Boyadjian. Mais on n'oubliera pas qu'il aida – plus qu'aucun autre sans doute – l'art naïf à sortir du ghetto où il se trouvait jusqu'alors confiné.

— José PIERRE

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Écrit par

  • : directeur de recherche au C.N.R.S., docteur ès lettres

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