BRETON ANDRÉ (1896-1966)
Attirance et dangers du communisme
Ainsi, dès sa naissance, le surréalisme se déclare en état de « non-conformisme absolu ». Rien de surprenant à ce qu'il rencontre un autre non-conformisme, celui des jeunes intellectuels communistes ou proches du communisme de la revue Clarté, principalement à l'occasion de la guerre du Maroc, qui vers le milieu de 1925 provoque une nouvelle flambée de nationalisme. À ce contact, l'attention de Breton se tourne vers le grand bouleversement qui est en train de s'opérer à l'Est ; transporté par la lecture du Lénine de Léon Trotski, en août 1925, il désigne à ses amis le communisme « comme le plus merveilleux agent de substitution d'un monde à un autre qui fût jamais ». Cette orientation est pour lui la source de longues difficultés : difficultés dans le groupe surréaliste même, certains refusant le passage à l'activité politique, d'autres le voulant total ; difficultés avec la direction communiste, à qui le sens de l'activité surréaliste échappe complètement et qui la regarde avec suspicion. Mais Breton, bien qu'il ait adhéré en 1927 au Parti communiste, se refuse à renoncer aux recherches proprement surréalistes (comme l'attestent Légitime défense et Au grand jour). Aussi son activité dans les rangs du parti est-elle de peu de durée. Cependant sa rupture définitive avec le communisme officiel n'intervient qu'après plusieurs années de heurts, notamment au sein de l'Association des écrivains et artistes révolutionnaires, dont il a été un membre très actif ; elle se produit en juin 1935, lors du Congrès international pour la défense de la culture (Position politique du surréalisme). Il n'en continue pas moins à mener avec ses amis une lutte sans défaillance contre le monde capitaliste, intervenant vigoureusement dans tous les combats, contre le colonialisme sous toutes ses formes, contre la montée du fascisme en 1934, contre la fausse neutralité du gouvernement français lors de la révolution espagnole, contre la guerre impérialiste. Il est de ceux qui se battent dans la position la plus périlleuse, sur deux fronts ; ennemi du monde bourgeois, il estime qu'il n'en doit pas moins dénoncer avec vigueur les erreurs et les tares du régime soviétique sous la direction de Staline et dit sa défiance à l'égard du « chef tout-puissant sous lequel ce régime tourne à la négation même de ce qu'il devrait être et de ce qu'il a été ». Il est un des premiers, en 1936 et 1937, à s'élever contre les procès de Moscou. Dans le domaine intellectuel, au temps où triomphe le dogme du « réalisme socialiste », Breton ne cesse d'affirmer le droit pour l'artiste à une recherche libre ; l'art et la poésie, s'ils se plient à des directives et à des fins qui leur sont extérieures, s'appauvrissent et se nient. On ne peut régenter du dehors l'obscur laboratoire intérieur où l'œuvre d'art prend naissance, mais toute œuvre digne de ce nom porte en elle-même une contestation de la réalité présente, toute œuvre digne de ce nom est libératrice : « Le besoin d'émancipation de l'esprit n'a qu'à suivre son cours naturel pour être amené à se fondre et à se retremper dans cette nécessité primordiale : le besoin d'émancipation de l'homme. »
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Écrit par
- Marguerite BONNET : docteur d'État, professeur à l'université de Tours
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