Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

FRANÇOIS-PONCET ANDRÉ (1887-1978)

La personnalité d'André François-Poncet, germaniste, journaliste, député, ambassadeur, académicien, est tout aussi marquante que le caractère dramatique des événements auxquels il fut mêlé.

Jeune lycéen, il avait été envoyé par son père magistrat étudier outre-Rhin. Normalien, il avait passé brillamment l'agrégation d'allemand. Journaliste, il fut le fondateur du Bulletin quotidien, publication économique dont l'éclat s'éteignit quand il la quitta. Lors de l'occupation de la Ruhr, il se distingua dans les fonctions de chef de presse auprès du général Degoutte.

Élu député à Paris en 1924, réélu en 1928, il milita à l'Alliance républicaine et démocratique aux côtés d'un André Tardieu, d'un Pierre-Étienne Flandin, d'un Paul Reynaud et fut plusieurs fois sous-secrétaire d'État aux Beaux-Arts et à l'Économie nationale. De tendance plutôt conservatrice, il était essentiellement un libéral, rejetant tout autoritarisme, mais convaincu de la nécessité de l'ordre et d'une industrie française solide face à l'industrie allemande.

Poincaré était son modèle. Quelque peu déçu par la carrière parlementaire, il se fit nommer, dans l'été de 1931, ambassadeur à Berlin en mission temporaire. Le premier conflit mondial lui avait laissé l'horreur de la guerre. Tous ses efforts devaient tendre à éviter pour la France le retour de pareilles épreuves. La tentative généreuse d'Aristide Briand et de Gustav Stresemann n'avait pas été suivie du succès espéré ; mais le rapprochement, s'il avait échoué par les gauches, pourrait, pensait-il, réussir éventuellement par les droites. Le nationalisme des milieux militaires et de l'entourage de Hindenburg le déçut rapidement. Il n'en poursuivit pas moins sa recherche du maintien de la paix et accepta son ambassade à titre définitif. Il y modernisa et accéléra le travail.

Inquiet de réformes agraires qui pourraient menacer sa terre de Neudeck, le maréchal Hindenburg renvoya le chancelier Brüning qui venait de le faire réélire, appela Franz von Papen et son cabinet de barons, renvoya ensuite le général von Schleicher pour la même raison et, enfin, sous l'action de von Papen, installa Hitler à la chancellerie. François-Poncet signala tous les périls que représentait celui-ci et dénonça avec indignation les crimes nazis. Il dressa le tableau le mieux informé des forces des SA (Sturmabteilung) et SS (Schutzstaffel) et du réarmement secret puis public du IIIe Reich.

Il avait, dès le début, conseillé de conclure des accords de désarmement qui endigueraient ces développements ; mais l'instabilité gouvernementale rendait la France incapable de décisions hardies dans un sens ou dans l'autre. Les généraux français sous-estimaient la force militaire du IIIe Reich. François-Poncet en mesurait le terrible danger. Ainsi s'explique l'attitude qu'il adopta à Munich. Mais l'échéance suivante ne serait-elle pas plus redoutable encore ?

Las de faits accomplis sans cesse répétés, et hanté par le cycle infernal dans lequel Hitler s'était engagé, François-Poncet, après Munich, souhaita quitter l'Allemagne, espérant, avec le prestige qu'il s'était acquis à Berlin, disposer auprès de Mussolini d'une certaine audience et l'aider à exercer sur le Führer une influence salutaire. Mais, à Rome, l'excitation antifrançaise se donnait libre cours : Mussolini le faisait attendre trois semaines pour la remise de ses lettres de créance ; le comte Ciano lui battait froid ; la Chambre des Faisceaux criait en sa présence : « Corsica, Tunisia, Savoia ! » Il eut le mérite de se faire, au prix de combien de patience, une situation, sinon auprès du Duce toujours plus impressionné par les armes nouvelles de Hitler, du moins auprès de Ciano,[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Média

André François-Poncet et Konrad Adenauer, 1951 - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

André François-Poncet et Konrad Adenauer, 1951